LA CLEF – 6/10

Synopsis : Depuis peu Eric Vincent, trentenaire sans histoire, a un fort sentiment de malaise. Est-ce la peur d’avoir un enfant ou celle de voir brutalement resurgir le fantôme d’un père qu’il n’a jamais connu ?
Un matin, un inconnu l’appelle pour lui proposer de récupérer les cendres de son père. D’abord réticent, il finit par accepter et se retrouve plongé au coeur d’une machination infernale.

 
Avis : Après le très raté Le concile de Pierre, Nicloux revient au polar sombre et clinique dans lequel il excelle. Plus complexe dans l’intrigue que Cette femme-là et Une affaire privée, La Clef impressione surtout par son côté méticuleux et précis, efficace sans esbrouffe. La juxtaposition de 3 histoires décalées dans le temps mais reliées entre elle par le héros principal est parfaitement maitrisée. Si le film trouve ses limites dans la connexion entre les différents et très nombreux personnages, on reste accroché, d’une part grâce à la tension permanente que Nicloux instore par sa réalisation séche et sans complaisance, et d’autre part grâce à une direction d’acteurs parfaite. Canet trouve un de ces meilleurs rôles, on retrouve Balasko et Lhermitte, parfaits dans leurs rôles tenus dans les précédents films de Nicloux, et Gillain et Paradis semblent n’avoir jamais été aussi justes. Du bon polar, froid et prenant.

ACTRICES – 3/10

Synopsis : Comédienne hantée par son rôle de Nathalia Petrovna, l’héroïne de la pièce de Tourguéniev Un Mois à la campagne qu’elle répète difficilement, Marcelline tente de noyer ses angoisses dans une piscine sur un air de Glenn Miller. Mais rien n’y fait. Rien n’empêche le temps de courir et de lui imposer ses quarante ans et toujours pas d’enfant. Perpétuellement étonnée par le monde qu’elle regarde comme si elle n’en trouvait pas la clé, Marcelline cherche sans relâche à communiquer avec tous ceux qui l’entourent…
Mais qu’est-ce qui pourra réellement aider Marcelline à comprendre ce qu’elle fait sur terre ? La Sainte-Vierge avec laquelle elle négocie, le fantôme magnifique de son père assis sur un joli canapé, le regard toqué de sa mère qui aime se promener en barque ou tout simplement un baiser reçu un soir du plus jeune des jeunes premiers ?…
 
Avis : Film instable, bavard, où les acteurs semblent s’écouter parler, s’écouter jouer, Actrices donne la désagréable impression d’être invité à un happy few où on n’est pas forcément le bienvenu. Bruni Tedeschi fait son auto-psycho à l’écran, sorte de thérapie cinématographique légérement prétentieuse et en fait, ben… on s’en fout un peu… S’il y a un message, il m’est passé largement au dessus… Mais Noémie Lvovsky est comme d’habitude très bien.

SWEENEY TODD – 4/10

Synopsis : Sweeney Todd, un barbier injustement envoyé en prison dont la vie de famille a été détruite, jure de se venger à sa sortie. De retour en ville pour rouvrir sa boutique, il devient le "Demon Barber of Fleet Street" qui "rase la gorge des gentilshommes dont on n’en entend plus parler après".
 
Avis : D’ordinaire plutôt très bon client de Burton, je dois avouer ma grande déception (frustration) après le visionnage de ce qui s’annonçait comme un grand cru Burtonien : un personnage à la marge (un barbier injustemment condamné, qui revient 20 ans plus tard pour se venger), un univers gothique à souhait (Londres XIXème), un méchant culte (Alan Rickman), des thèmes frôlant la perversité (amour inavouable et sérial killer) et Johnny Depp. N’en jetez plus, vous allez voir ce que vous allez voir! et en plus c’est une comédie musicale, quelle audace! Et ben pour voir, j’ai vu. en fait j’ai surtout souffert… Plus de 2 heures d’une comédie musicale aux chansons ennuyeuses et répétitives au possible, d’un classicisme pesant (et etonnant pour Burton). 
Et sans doute que le contexte est justement trop burtonien, le réalisateur se laissant aller à la facilité. Un air de déjà vu et revu hante le film… L‘univers Burtonien nous entraîne bien dans les premières minutes, mais au bout d’un moment ça ne suffit plus à maintenir l’intérêt du film. L’histoire et les personnages sont creux et sans aspérité (alors que le point départ est quand même très prometteur), les musiques prenant le dessus sur la construction des protagonistes.
Bref, peut-être suis-je passé à côté du film, mais je me suis royalement emmerdé, redoutant chaque passage ou les acteurs commençaient à ouvrir la bouche pour chanter ce qui me semblait être le même air pour la vingtième fois.

GONE, BABY GONE – 7/10

Réalisé par Ben Affleck

Synopsis : Dans une banlieue ouvrière de Boston, la petite Amanda a disparu. Après l’échec des recherches menées par la police, la tante et l’oncle de l’enfant décident de faire appel à des détectives privés du coin, Patrick Kenzie et Angie Gennaro.
Patrick et Angie connaissent bien le quartier, au point de savoir que Hélène, la mère d’Amanda, est une droguée. Plus ils enquêtent, plus ils découvrent l’envers de la ville dans ce qu’il a de plus sombre. Ils s’enfoncent au-delà des mensonges et des faux-semblants, vers les secrets les plus noirs de la ville, là où règnent les dealers, les criminels et les pédophiles. Cela ne les aide pourtant pas dans leur enquête et Amanda reste introuvable.
Face à la pression médiatique, Remy Bressant, un enquêteur qui ne lâche jamais, et le capitaine de police Jack Doyle vont aussi s’attaquer à l’enquête. La vérité finira par surgir, mais elle aura un prix. Chaque ville a ses secrets, chaque humain sa conscience…
 
Avis : A partir d’un fait divers (l’enlèvement d’une petite fille) qui semble plus adapté à un scénario d’un série, genre FBI : portés disparu, Ben Affleck réussit un joli tour de force en réalisant un polar subtil, jamais putassier, et qui tient le spectateur solidement accroché à l’écran. Il dirige des acteurs solides, et son style à la fois sec et réaliste démontre une vraie humilité, bien venue pour traiter ce sujet délicat. Ce n’est pas un hasard si le film rappelle parfois Mystic River, puisque Gone baby gone est l’adaptation d’un roman du même auteur. Les intrigues s’enchainent, les rebondissement sont maîtrisés et le rythme ne baisse jamais, la tension est ménagée en permanence jusqu’à la révelation finale. De plus, il aborde le thème casse-gueule du choix entre le bien et le mal sans tomber dans le manicheïsme, se gardant bien de porter un jugement. Enfin, le film confirme, après Jesse James, la révélation Casey Affleck, parfait encore une fois.

I’M NOT THERE – 7/10

Réalisé par Todd Haynes

Synopsis : Un voyage à travers les âges de la vie de Bob Dylan. Six acteurs incarnent Dylan tel un kaléïdoscope de personnages changeants : poète, prophète, hors-la-loi, imposteur, comédien, martyr et "Born Again". Ils participent tous à l’esquisse d’un portrait de cette icône américaine définitivement insaisissable.
 
Avis : Ovni brillant, I’m not there est un film déroutant, sorte de patchwork des vies fantasmées de Bob Dylan. Todd
Haynes navigue brillament entre différents styles cinématographiques, créant autant d’univers que de Dylan dans un
profusion d’idées et un esthetisme classieux. Certains plans sont d’une beauté à couper le souffle, extrêment
détaillés (le village de Gee), et d’autres bénéficient d’un montage nerveux mais maîtrisé fascinant. Haynes utilise
notamment un noir et blanc un peu "usé", granuleux, et trimballe sa caméra aux milieux des acteurs qui la fixe.
Hypnotique comme une photo qui nous happe et dans laquelle on voudrait rentrer.
La limite du film est finalement la mienne et ma totale méconnaissance de la vie de Dylan. Forcément, je n’ai pas
toute les clefs pour appréhender l’objet, d’où une certaine frustration et le sentiment fréquent d’être largué.
Mais on s’accroche et finalement, le message passe dans sa globalité. La responsabilité qu’engendre la célébrité.
Qu’en faire? l’utiliser pour contester, la fuir? A t-on le droit de renoncer à ce pouvoir?
A noter que la musique de Dylan permet au film de prendre une épaisseur supplémentaire, lui permettant de monter en
émotion.
Vraiment très interessant.

LA NUIT NOUS APPARTIENT – 7/10

Réalisé par James Gray

Synopsis : New York, fin des années 80. Bobby est le jeune patron d’une boite de nuit branchée appartenant aux Russes. Avec l’explosion du trafic de drogue, la mafia russe étend son influence sur le monde de la nuit.
Pour continuer son ascension, Bobby doit cacher ses liens avec sa famille. Seule sa petite amie, Amada est au courant : son frère, Joseph, et son père, Burt, sont des membres éminents de la police new-yorkaise…
Chaque jour, l’affrontement entre la mafia russe et la police est de plus en plus violent, et face aux menaces qui pèsent contre sa famille Bobby va devoir choisir son camp…

Avis : Sept ans après le déjà excellent The Yards, James Gray revient avec un polar noir et intense doublé d’une tragédie familiale aux allures de tragédie grecque. Si on pense d’abord assister à un affrontement à mort entre deux frères ayant suivi deux voies diamétralement opposées, la police comme papa pour le premier, le mode de la nuit et de ses excès pour le second, le film se concentre vite sur la lutte intérieur du fils indigne : le choix entre le bien ou le mal, trahir mais qui? sa famille? sa liberté? Dilemne qui mène forcément au drame. Le réalisateur saisit à travers un classicisme bienvenu les démons qui habitent les personnages, surtout celui incarné par le charismatique Joaquin Phoenix. Et ponctue sont récit de scènes d’une tension incroyable, le spectateur retient son souffle plus d’une fois devant des situations où la maîtrise rivalise avec la virtuosité (une immersion dans la planque des dealeurs, une poursuite incroyable en voiture sous la pluie, la traque finale au milieu des jongs).Gray y joue avec nos nerfs, et c’est très bon. S’il pouvait éviter d’attendre 7 ans avant le prochain… Ah, et au passage Eva Mendes est bien bien mieux qu’une potiche de blockbuster.