2015 – LE TOP 15

SicarioVice VersaVictoria

 

01 – SICARIO
02 – VICE-VERSA
03 – VICTORIA
04 – LE FILS DE SAUL
05 – LA LOI DU MARCHE
06 – MAD MAX : FURY ROAD
07 – A MOST VIOLENT YEAR
08 – MACBETH
09 – AMY
10 – A TROIS ON Y VA
11 – VALLEY OF LOVE
12 – THE BIG SHORT
13 – FOXCATCHER
14 – IT FOLLOWS
15 – THE VOICES

THE BIG SHORT – 15/20

The Big Short : le Casse du siècleRéalisé par Adam McKay
Avec Christian Bale, Steve Carell, Ryan Gosling

Avis : A la fois passionnant, divertissant et édifiant, The Big Short s’impose en parfait complément d’un triptyque sur la crise des subprimes qu’il composerait avec le documentaire Inside Job et le thriller financier Margin Call. Le premier, essentiel, est une analyse pédagogique et éclairante des mécanismes qui ont précipité le monde financier dans le chaos, tandis que le second suivait un groupe de traders fictionnels pris de panique le jour de l’éclatement de la bulle immobilière.
The Big Short s’inspire quant à lui d’une histoire vraie, et raconte comment un petit nombre de personnages gravitant autour des grands groupes financiers ont repéré des mois avant le krach l’instabilité et la dangerosité du système des subprimes.
Bien que le propos soit complexe et le langage financier exposé ici très obtus (comme le dit le personnage de Ryan Gosling, c’est fait exprès pour que le quidam ne pose pas de question), The Big Short est construit comme une admirable opération de vulgarisation de la crise qui a ruiné des millions d’américains, et ce grâce à l’utilisation des codes de la comédie dont le réalisateur Adam McKay est coutumier. Ruptures de ton, apartés des comédiens face caméra, incrustations à l’écran, dialogues incisifs et rythmés, la mise en scène, bien qu’un peu ostentatoire, est inspirée. Certes, il faut s’accrocher un peu, mais on comprend globalement ce qui motive chaque protagoniste tout en (re)découvrant effarés le cynisme, l’irresponsabilité et l’avidité criminelle de tous les acteurs de cette gigantesque fraude. C’est drôle et effrayant à la fois, McKay maniant habilement l’humour pour dénoncer et s’indigner, tout en faisant efficacement monter la tension jusqu’au krach. Il est épaulé par de nombreux acteurs brillants et investis (Carell, Gosling et Bale en tête).
A l’image de Inside Job et Margin Call, The Big Short s’achève sur une conclusion amère et en soi révoltante, le constat que les principaux responsables de ce drame économique et humain s’en sortent en toute impunité et que finalement rien n’a changé.
Quelques jours avant la crise, le personnage de Carell hurle que les banquiers ne se rendent pas compte que c’est la fin du capitalisme qui s’annonce. C’est sans doute le moment où il aura été le moins lucide…

Synopsis : Wall Street. 2005. Profitant de l’aveuglement généralisé des grosses banques, des medias et du gouvernement, quatre outsiders anticipent l’explosion de la bulle financière et mettent au point… le casse du siècle ! Michael Burry, Mark Baum, Jared Vennett et Ben Rickert : des personnages visionnaires et hors du commun qui vont parier contre les banques … et tenter de rafler la mise !

LE PONT DES ESPIONS – 14/20

Le Pont des EspionsRéalisé par Steven Spielberg
Avec Tom Hanks, Mark Rylance, Scott Shepherd (II)

Avis : Ce qui est rassurant avec un film de Steven Spielberg, c’est qu’on est rarement déçu. Au pire, on profite d’un bon divertissement, au mieux on découvre un classique instantané.
Le Pont des Espions appartient à la catégorie des films historiques du réalisateur, ceux qui placent un héros ordinaire au cœur de la Grande Histoire, un matériau qui lui a souvent permis de bâtir ses chefs d’œuvre. Sans qu’il puisse être qualifié de tel, Le Pont des Espions se révèlent d’une grande solidité. Après avoir largement abordé les deux Guerres Mondiales dans sa filmographie, Spielberg s’intéresse pour la première fois frontalement à la Guerre Froide. Le contexte est plus complexe, plus trouble, le récit plus géopolitique, plus tactique voir technique et par conséquent dramatiquement moins évident. Cela ne l’empêche pas de raconter l’histoire de James Donovan avec une grande fluidité, un peu d’humour et un talent de storyteller que sa mise en scène sans le moindre accroc met parfaitement en valeur. Elle est certes empreinte d’un grand classicisme, mais permet à Spielberg de donner un angle assez large à son récit. Au-delà de narrer le destin extraordinaire de Donovan, il offre une lecture pertinente de la guerre froide, dangereux jeu de dupes, et dévoile en toile de fond les premières heures du mur de Berlin, dans quelques scènes discrètes mais assez saisissantes. Une manière d’introduite l’idée que si la mission de Donovan s’achève, ce n’est que le début d’une ère terrible pour les Berlinois tout en faisant résonner son film dans notre époque.
Et puis il y a Tom Hanks. Il habite une fois de plus à la perfection l’humanité de ce personnage de conviction qui trouve un étonnant alter ego en la personne de l’espion russe, interprété par Mark Rylance. Leur improbable complicité sert de fil rouge au film, lui donne liant et relief.
Vraiment, on n’est jamais déçu.

Synopsis : James Donovan, un avocat de Brooklyn se retrouve plongé au cœur de la guerre froide lorsque la CIA l’envoie accomplir une mission presque impossible : négocier la libération du pilote d’un avion espion américain U-2 qui a été capturé.

LE NOUVEAU – 13/20

Le NouveauRéalisé par Rudi Rosenberg
Avec Max Boublil, Rephael Ghrenassia, Joshua Raccah

Avis : Chronique pré-adolescente, Le Nouveau sonne très juste dans la façon dont il croque l’âge ingrat. Issus de milieux aisés, la bande de gamins que suit le réalisateur a pour principal préoccupation de gérer leur révolution hormonale. Des situations simples, universelles, de celles qui se passent dans toutes les cours de collèges, où l’acceptation et le sentiment d’appartenance priment sur tout et où la moindre vexation peut entraîner un terrible sentiment de rejet. C’est rafraîchissant de naturel, construit avec pas mal d’humour et sans cynisme, la cruauté inhérente à cet âge étant contrebalancée par les liens amicaux forts qui s’y construisent malgré tout. Surtout, le film s’appuie sur de jeunes comédiens non-professionnels épatants, en particulier Rephael Ghrenassia d’une étonnante maturité pour son âge, fait tellement rare dans le cinéma français. On en reparlera sans doute très vite.

Synopsis : La première semaine de Benoit dans son nouveau collège ne se passe pas comme il l’aurait espéré. Il est malmené par la bande de Charles, des garçons populaires, et les seuls élèves à l’accueillir avec bienveillance sont des « ringards ». Heureusement, il y a Johanna, jolie suédoise avec qui Benoit se lie d’amitié et tombe sous le charme. Hélas, celle-ci s’éloigne peu à peu pour intégrer la bande de Charles. Sur les conseils de son oncle, Benoit organise une soirée et invite toute sa classe. L’occasion de devenir populaire et de retrouver Johanna.

LE GRAND PARTAGE – 3/20

Le Grand partageRéalisé par Alexandra Leclère
Avec Karin Viard, Didier Bourdon, Valérie Bonneton

Avis : Bardé d’un casting séduisant (Viard, Bourdon, Bonneton, Chesnais, Vuillermoz, Balasko), Le grand partage laissait espérer une comédie sociale réfléchie et incisive sur ce que deviennent la solidarité et les beaux principes d’entraide lorsqu’ils entravent notre petit confort bourgeois.
Las ! La réalisatrice est trop occupée à se battre avec un scénario indigent et des dialogues patauds pour prendre le temps d’élaborer ne serait-ce que l’ébauche d’un pamphlet sur notre société contemporaine.
D’une maladresse affligeante, Le Grand Partage appuierait presque ce qu’il devrait dénoncer. Dépourvu du moindre rythme et plombé par une accumulation de clichés, tout sonne faux et chaque tentative comique tombe à plat. Grossier et anti-naturel, le long-métrage se saborde en mettant en avant de trop nombreux personnages caricaturaux aux interactions si peu probables qu’elles en deviennent grotesque. A se demander comment les acteurs ont pu se convaincre qu’ils auraient quelque chose à défendre…
Sans aucun message ni point de vue, Le Grand Partage est surtout un grand ratage.


Avis : Un hiver pire que jamais. Le gouvernement publie un décret obligeant les citoyens français les mieux logés à accueillir chez eux pendant la vague de froid leurs concitoyens en situation précaire. A l’heure du Grand Partage, un vent de panique s’installe à tous les étages dans un immeuble très chic de la capitale.

STAR WARS : LE RÉVEIL DE LA FORCE – 14,5/20

Star Wars - Le Réveil de la ForceRéalisé par J.J. Abrams
Avec Daisy Ridley, John Boyega, Oscar Isaac

Avis : J.J. Abrams et Kathleen Kennedy ont donc réussi leur pari. Leur Star Wars témoigne à la fois d’un respect des fans et de la trilogie originelle proche de la déférence tout en donnant une nouvelle orientation à la mythologie. On savait le réalisateur capable d’insuffler de la modernité et une vision résolument pop à des univers en sommeil (le premier Star Trek), mais on pouvait redouter son incapacité à supporter le poids des références (Super 8 – hommage dépassé et sans intérêt au cinéma de Spielberg). Le Réveil de la force se situe un peu entre les deux, mais emporte finalement l’adhésion grâce au talent d’Abrams pour faire co-exister et interagir des personnages forts (Alias, Lost).
S’il n’est pas particulièrement connu pour sa virtuosité dans les scènes d’action, il fait plus qu’honorablement le job (en particulier la résurrection du Faucon Millenium), en y intégrant une bonne dose d’humain et un peu de légèreté.
Mais la principale, primordiale, vitale qualité de cet Episode VII est d’avoir respecté à la lettre la note d’intention de Kennedy au rachat de Lucas Films: Le Réveil de la force s’inscrirait dans la droite lignée graphique et esthétique des films originaux ou ne serait pas. Oublié les CGI et effets numériques à outrance du prequel (à l’exception de grosses bébêtes dans un couloir, on oublie vite), retour aux effets mécaniques, à la crasse, à la rouille, à la ferraille usée par le sable, aux montagnes et aux forêts. L’esprit est bien là, le score mythique et iconique de John Williams reprend toute sa force et dégage une charge émotionnelle renouvelée. Le cadre est posé pour de grands morceaux de bravoure, des élans romanesques et de nouveaux traumas familiaux.
Certes, le scénario est principalement construit autour de coïncidences heureuses (Rey croise quand même souvent les bonnes personnes au bon moment), certes il utilise des raccourcis bien utiles (la force se contrôle bien vite chez la jeune fille), certes le script est un calque plus ou moins grossier des évènements d’Un Nouvel Espoir, mais la manière dont il fait cohabiter références au passé et promesses à venir est suffisamment astucieuse pour susciter à la fois émotion et nostalgie et donner une impulsion régénératrice au mythe. Surtout, il a l’intelligence de ne pas tourner autour du pot et de rapidement lever le voile sur les origines du bad guy, héritier direct des évènements de la première trilogie. Kylo Ren est une vraie réussite. S’il veut marcher sur les traces de Vador, il est aussi caractériel et instable que son modèle était dans la maitrise. On devine un charisme évident et un destin shakespearien au personnage interprété par l’intense Adam Driver qu’on a hâte de retrouver dans l’épisode VIII. D’une manière générale, les nouveaux personnages sont tous très convaincants et donnent remarquablement le change aux vieilles gloires de la saga, Harrison Ford en tête. Ce dernier enfile le costume de Han Solo comme s’il ne l’avait jamais quitté et s’avère être le véritable point central du Réveil de la Force. Son passage de témoin à la nouvelle génération apparait parfaitement naturel et particulièrement poignant. On retrouve aussi un humour, une fraicheur réjouissante dans ce nouvel opus. Figures de prou d’un casting irréprochable, Daisy Ridley (Rey), John Boyega (Finn) et le grand Oscar Isaac (Poe, qu’on espère moins sous-employé dans les prochains épisodes), en sont de parfaites illustrations.
C’est donc bien dans la caractérisation des personnages qu’il faut chercher l’élément différenciant et le nouvel élan qu’apportent J.J. Abrams à Star Wars et on se doute que c’est de leur évolution et de l’empreinte qu’ils laisseront sur le mythe que dépendra la légitimité de cette nouvelle trilogie. Le premier pas est très convaincant. En attendant la suite…. May the force be with Rian Johnson, en charge de l’épisode VIII.

Synopsis : Dans une galaxie lointaine, très lointaine, un nouvel épisode de la saga « Star Wars », 30 ans après les événements du « Retour du Jedi ».

BACK HOME – 13,5/20

Back HomeRéalisé par Joachim Trier
Avec Isabelle Huppert, Gabriel Byrne, Jesse Eisenberg

Avis : Dans la lignée de son très beau Oslo 31 août, Joachim Trier ne se départit pas d’un esthétisme très sûr pour son premier film en langue anglaise. Il livre un drame familial à la poésie aérienne, et offre une lecture touchante des interactions entre un père et ses deux fils après le décès de leur mère, photographe de guerre, et la façon dont chacun gère le deuil.
La structure éclatée du récit, rythmé par des flashbacks et des apartés oniriques, rend son expression vivante et stimulante. Elle crée des voiles sombres autour de la fratrie que le réalisateur lèvera au fur et à mesure, révélant une violence sourde et un mal être prégnant, hanté par le fantôme de la figure matriarcale, formidablement (des)incarné par Isabelle Huppert.
Back Home n’est cependant pas exempt de défauts. Certains arcs narratifs sont moins aboutis, notamment celui concernant Jonah (Jesse Eisenberg), plus artificiel. Le film n’évite pas non plus quelques longueurs. Mais c’est très beau et baigne dans une jolie mélancolie. La mise en scène de Trier est à ce titre sophistiquée mais élégante, faisant preuve du belle maîtrise et d’une exploitation intelligente de l’imagerie de reportage de guerre.
Sans se renier, le réalisateur norvégien s’adapte au cinéma indépendant américain avec aisance, appliquant son style très travaillé à une émouvante chronique familiale marquée du lourd poids de l’absence et des non-dits.

Synopsis : Alors que se prépare une exposition consacrée à la célèbre photographe Isabelle Reed trois ans après sa mort accidentelle, son mari et ses deux fils sont amenés à se réunir dans la maison familiale et évoquer ensemble les fantômes du passé…

LES COWBOYS – 14/20

Les CowboysRéalisé par Thomas Bidegain
Avec François Damiens, Finnegan Oldfield, Agathe Dronne

Avis : Brûlant d’actualité, surprenant aussi bien dans sa forme que dans son contenu, les Cow-boys résonne particulièrement fort au lendemain des événements tragiques ayant touché notre pays.
Le film ne cherche cependant jamais à appuyer un quelconque message politique, et préfère rester focalisé sur les conséquences de la disparition de Kelly. L’obsession d’un père pour la retrouver, un frère qui sacrifie sa jeunesse pour l’accompagner, la résignation d’une mère, c’est à travers le prisme familial que les Cow-boys prend sa dimension géopolitique et aborde la complexité de l’embrigadement des adolescents par les réseaux fondamentalistes. Le film reste cependant très factuel, concentré sur ses personnages et ne porte pas de jugement ni d’accusation, il se contente d’exposer les dangers auxquels les protagonistes s’exposent (et par extension la jeunesse actuelle).
On est définitivement dans la fiction, mais une fiction éclatée sur plusieurs genres, les Cow-boys se découpant clairement en trois parties distinctes, alternant mélo intimiste, thriller et road movie.
Thomas Bidegain peint au final une fresque familiale poignante et haletante. Que le film soit un modèle de fluidité dans son déroulé surprendra peu lorsqu’on sait que son réalisateur est le scénariste attitré de Jacques Audiard. Sa mise en scène fait preuve en outre d’une belle assurance, notamment lorsqu’il s’exporte en territoire lointain. Elle s’avère tendue et nerveuse et s’accompagne d’une musique parfois saisissante. Le récit se déroule ainsi avec puissance et émotion retenue, s’achevant sur un final d’une infinie pudeur. Des émotions finalement très humaines, délivrées par des acteurs d’une grande justesse, dont la révélation Finnegan Oldfield, intense et déterminé.

Synopsis : Une grande prairie, un rassemblement country western quelque part dans l’est de la France. Alain est l’un des piliers de cette communauté. Il danse avec Kelly, sa fille de 16 ans sous l’oeil attendri de sa femme et de leur jeune fils Kid. Mais ce jour là Kelly disparaît. La vie de la famille s’effondre. Alain n’aura alors de cesse que de chercher sa fille, au prix de l’amour des siens et de tout ce qu’il possédait. Le voilà projeté dans le fracas du monde. Un monde en plein bouleversement où son seul soutien sera désormais Kid, son fils, qui lui a sacrifié sa jeunesse, et qu’il traîne avec lui dans cette quête sans fin.