LA LA LAND – 18/20

La La Land : AfficheDe Damien Chazelle
Avec Ryan Gosling, Emma Stone

Chronique : La La Land appartient à cette catégorie d’œuvres que l’on peut qualifier de classique instantané. Au-delà de ses (immenses) qualités artistiques, c’est l’empreinte qu’elle laisse durablement sur les spectateurs qui en est l’irréfutable démonstration. C’est cet air qui reste dans la tête, cette furieuse envie de fredonner, de danser, de tomber amoureux… Oui, quelque chose de rare et d’évident traverse le film de Damien Chazelle.
Après l’intensité fiévreuse de l’électrisant Whiplash, le jeune réalisateur déploie des trésors d’élégance et une bonne dose de magie pour nous offrir une love story musicale littéralement touchée par la grâce.
Un plan séquence étourdissant et vertigineux en guise d’ouverture flamboyante, un final somme qui vous chavire le cœur, entre les deux, une histoire d’amour marquée du sceau des plus belles romances d’Hollywood, La La Land ne cesse jamais d’émerveiller.
Les numéros musicaux échappent miraculeusement à toute mièvrerie, ils sont entêtants (mais dans le bon sens), inventifs souvent, euphorisant parfois (ah cette soirée sur les hauteurs de LA..). Mais au-delà des vertus stimulantes des passages musicaux, La La Land offre aussi à travers les relations entre Mia l’actrice et Sebastian le pianiste, une très intéressante réflexion sur le rapport de l’artiste à son art et au monde.
Plus qu’il ne rend hommage aux comédies musicales d’antan, Damien Chazelle dépasse ses références pour suivre sa propre voie et imposer son propre style (un peu comme The Artist offrait une nouvelle lecture des films muets). D’ailleurs La La Land n’a pas peur de perdre sa légèreté lorsqu’il le faut et n’hésite pas à laisser la musique de côté pour renforcer une certaine dramaturgie. En cela, Chazelle fait preuve d’audace tout en démontrant une belle autorité pour imposer sa vision.
Surtout, il peut s’appuyer sur la virtuosité de sa mise en scène, sidérante de maîtrise et d’inventivité : fluidité de la scénographie, justesse des plans, précision des chorégraphies, une caméra qui semble en apesanteur, des tableaux somptueux aux couleurs pimpantes et harmonieuses … Chazelle nous plonge dans son film de la plus belle des manières, le sourire aux lèvres.
Mais le naturel et l’évidence qui se dégage de La La Land doit beaucoup à son couple vedette, aussi glamour que complémentaire et à l’alchimie manifeste. Emma Stone et Ryan Gosling ont cette beauté singulière qui les démarque des canons hollywoodiens. Elle, mutine et sur-expressive, fascine, amuse et émeut avec son regard immense. Lui est la preuve qu’un acteur n’a pas besoin d’en faire des tonnes pour être convaincant. Il lui suffit d’un haussement de cil ou un mouvement de lèvre pour changer d’expression et donner corps à son personnage. Si vous cherchez la définition du charisme… Ces deux-là semblent se comprendre d’instinct et cela se voit à l’écran. Pas sûr que le film eut atteint ce romanesque-là sans eux.
D’une beauté formelle constante, coloré et vivant, La La Land balance constamment entre modernité et onirisme. On ne peut le cloisonner à un renouveau de la comédie musicale. La La Land est un grand film, musical certes, mais il est réussi bien au-delà de son genre, un chef-d’œuvre qui redonne foi en Hollywood et sa capacité de réinvention.
Si la perfection n’existe pas, La La Land s’en est sacrement rapproché…

Synopsis : Au cœur de Los Angeles, une actrice en devenir prénommée Mia sert des cafés entre deux auditions.
De son côté, Sebastian, passionné de jazz, joue du piano dans des clubs miteux pour assurer sa subsistance.
Tous deux sont bien loin de la vie rêvée à laquelle ils aspirent…
Le destin va réunir ces doux rêveurs, mais leur coup de foudre résistera-t-il aux tentations, aux déceptions, et à la vie trépidante d’Hollywood ?

TOUS EN SCÈNE – 11,5/20

Tous en scène : AfficheDe Garth Jennings
Avec Patrick Bruel, Jenifer Bartoli, Elodie Martelet

Chronique : Quel étrange concept que de construire le scénario d’un film d’animation autour d’un concours de chant, et ce même si les participants sont d’amusantes bêbêtes. L’idée de voir un cochon, un hérisson ou un gorille se succéder pour interpréter une demi-centaine de chansons pop des dernières décennies ne revêt a priori pas un grand intérêt.
La première partie du film, sorte de pastiche anthropomorphe d’American Idol, ne fait rien pour aller à l’encontre du scepticisme original. Et puis progressivement les personnages commencent à se dessiner, l’humour à faire surface, le rythme à prendre, pour faire de Tous en scène un très honnête divertissement, assumant son statut de feel good movie éphémère et périssable, de ceux qui supportent difficilement un deuxième visionnage. Souffrant de longueurs inévitables lorsqu’il faut enchainer des tubes par définition inégaux, le film manque aussi cruellement de second degré et de plusieurs niveaux de lecture. La comparaison avec l’excellent Zootopie, qui mettait aussi en scène une cité animale, est d’autant plus douloureuse.
Reste que s’il s’adresse principalement aux têtes blondes, Tous en scène réussit quand même à dépasser les limites de son pitch bancal pour imposer sa bonne humeur, son humour et sa vitalité. Et aussi parfois à nous faire taper du pied … c’est sans doute toute sa réussite.

Synopsis : Buster Moon est un élégant koala qui dirige un grand théâtre, jadis illustre, mais aujourd’hui tombé en désuétude. Buster est un éternel optimiste, un peu bougon, qui aime son précieux théâtre au-delà de tout et serait prêt à tout pour le sauver. C’est alors qu’il trouve une chance en or pour redorer son blason tout en évitant la destruction de ses rêves et de toutes ses ambitions: une compétition mondiale de chant. Cinq candidats sont retenus pour ce défi: Une souris aussi séduisante que malhonnête, un jeune éléphant timide dévoré par le trac, une truie mère de famille débordée par ses 25 marcassins, un jeune gorille délinquant qui ne cherche qu’à échapper à sa famille, et une porc épic punk qui peine à se débarrasser de son petit ami à l’égo surdimensionné pour faire une carrière solo. Tout ce petit monde va venir chercher sur la scène de Buster l’opportunité qui pourra changer leur vie à jamais.

DALIDA – 13/20

Dalida : AfficheDe Lisa Azuelos
Avec Sveva Alviti, Riccardo Scamarcio, Jean-Paul Rouve

Chronique : Plus que le destin d’une icône de la culture populaire, Dalida se révèle être un touchant portrait de femme. Une femme triste, en perpétuelle quête d’un bonheur qu’elle ne fera jamais qu’entrevoir. Les rares moments joyeux de sa vie auront été ceux passés sur scène ou dans les bras d’un homme. Mais finalement, Dalida aura vécu une existence marquée par une insatisfaction maladive et une solitude chronique, une existence dramatiquement frappée par la mort.
Réputée pour sa mise en scène dynamique et vivante, moins pour la sophistication de ses réalisations, Lisa Azuelos (LOL, Comme t’y es belle) parvient, à modeler son récit d’une manière intéressante, entre flash-backs, témoignages et une plus classique linéarité. Cette pluralité de choix narratifs pourrait être une faiblesse, elle permet au contraire de maintenir l’intérêt et d’éviter les longueurs souvent inhérentes au genre. Elle a surtout eu le flair / la chance / le talent (au choix) de dénicher une actrice sidérante de mimétisme avec la star. Sveva Alviti est de surcroit suffisamment bonne interprète pour qu’elle traduise parfaitement le malaise et la solitude qui ont ravagé la vie de l’artiste. A ces côtés brille surtout Riccardo Scarmacio, très fin dans son interprétation d’Orlando (quoique sans doute un poil flatteuse puisque le frère de Dalida a co-écrit le scénario).
Enfin, si ses chansons ne sont pas ma tasse de thé, loin de là, elles prennent une autre dimension lorsqu’on s’aperçoit qu’elles viennent toutes raisonner en écho aux épisodes de la vie romanesque de l’artiste. Leur utilisation en arrière-plan plus que comme moteur du récit confirme la volonté de la réalisatrice de se concentrer sur le destin tragique d’une amoureuse maudite plus que d’une vedette de la chanson.
Dalida s’avère donc être un biopic réussi, un portrait émouvant parcouru par une indicible tristesse et une terrible mélancolie.

Synopsis : De sa naissance au Caire en 1933 à son premier Olympia en 1956, de son mariage avec Lucien Morisse, patron de la jeune radio Europe n°1, aux soirées disco, de ses voyages initiatiques en Inde au succès mondial de Gigi l’Amoroso en 1974, le film Dalida est le portrait intime d’une femme absolue, complexe et solaire… Une femme moderne à une époque qui l’était moins … Malgré son suicide en 1987, Dalida continue de rayonner de sa présence éternelle.

NOCTURNAL ANIMALS – 15/20

Nocturnal Animals : AfficheDe Tom Ford
Avec Amy Adams, Jake Gyllenhaal, Michael Shannon

Chronique : Un film de Tom Ford est souvent plus qu’une simple histoire. C’est aussi un geste artistique, la recherche du beau, ou du moins la volonté de créer une œuvre formellement singulière. Nocturnal Animals, comme A single man auparavant, est indéniablement marqué par cet élan.
Le réalisateur nous accueille d’ailleurs dans son univers par un générique surprenant, superbe dans sa non-conformité, et annonciateur de la mise en scène ultra-sophistiquée qui parcoure le film. Son Nocturnal Animals est beau, audacieux, parfois déroutant.
Le style flamboyant dont il fait preuve iconise son couple star, les magnifiques et hypnotiques Jack Gyllenhaal et Amy Adams. Ils évoluent au grès de plans somptueux que ce soit dans le luxe et l’apparat de Los Angeles ou l’aridité et la violence des déserts du Texas.
Mais si cette mise en scène est chiadée, elle n’est pas ostentatoire pour autant et surtout pas vaine. Elle sert parfaitement un scénario solide, habile et intense qui fait des allers-retours entre réalité et fiction, passé et présent. Cela pourrait être confus et illisible, mais cela fonctionne assez miraculeusement. Fluide et malin dans la narration de ce récit à tiroirs, Nocturnal Animals convainc par l’intensité du pan romancé et son écho dans la vie sentimentale en berne de Susan.
Chaque partie est intéressante pour elle-même mais fait pourtant écho aux autres avec une sorte d’évidence. Ce découpage précis et élégant permet de dépasser l’apparente froideur qui plane sur le film pour nous y plonger totalement.
Nocturnal Animals est ainsi l’éclatante confirmation d’un cinéaste de l’esthétisme, certes, mais également doué pour raconter des histoires. Et doué pour les raconter joliment.

Synopsis : Susan Morrow, une galeriste d’art de Los Angeles, s’ennuie dans l’opulence de son existence, délaissée par son riche mari Hutton. Alors que ce dernier s’absente, encore une fois, en voyage d’affaires, Susan reçoit un colis inattendu : un manuscrit signé de son ex-mari Edward Sheffield dont elle est sans nouvelles depuis des années. Une note l’accompagne, enjoignant la jeune femme à le lire puis à le contacter lors de son passage en ville. Seule dans sa maison vide, elle entame la lecture de l’oeuvre qui lui est dédicacée.
Dans ce récit aussi violent que bouleversant, Edwards se met en scène dans le rôle de Tony Hastings, un père de famille aux prises avec un gang de voleurs de voiture ultraviolents, mené par l’imprévisible Ray Marcus.
Après lui avoir fait quitter la route, le gang l’abandonne impuissant sur le bas-côté, prenant sa famille en otage. Ce n’est qu’à l’aube qu’il parvient au commissariat le plus proche, où il est pris en charge par le taciturne officier Bobby Andes . Un lien fort va se créer entre les deux hommes, et lier leurs destins dans la poursuite des suspects, coupables d’avoir donné vie au pire des cauchemars de Tony.