UN PROPHETE – 8/10

 

Un prophète

 
Synopsis : Condamné à six ans de prison, Malik El Djebena ne sait ni lire, ni écrire. A son arrivée en Centrale, seul au monde, il paraît plus jeune, plus fragile que les autres détenus. Il a 19 ans.
D’emblée, il tombe sous la coupe d’un groupe de prisonniers corses qui fait régner sa loi dans la prison. Le jeune homme apprend vite. Au fil des " missions ", il s’endurcit et gagne la confiance des Corses.
Mais, très vite, Malik utilise toute son intelligence pour développer discrètement son propre réseau…
 
Avis : Qualifié de chef-d’œuvre par la plupart des critiques à sa sortie, Un prophète a tout du classique instantané.
Fidèle à sa réputation, Audiard cisèle une oeuvre dense, violente et enlevée. Il joue à la perfection de sa science des plans, use de la lumière avec virtuosité et enrichit l’intensité du récit par l’utilisation d’une musique variée toujours parfaitement ajustée (ah, le dernier morceau de Kurt Weil…). Et le montage parfait donne
une fluidité insolente au film, qui ne souffre quasiment jamais de baisse de rythme ou de moments creux. Tout à un sens, rien ne dépasse. Evidemment, le matériau de base est solide. L’ascension de Malik, jeune homme analphabète de 19 ans, dans l’univers brutal, corrompu et communautaire des prisons est un modèle du genre. Réaliste, mais suffisamment riche pour que l’histoire nous tienne en haleine. Le personnage évolue dans une grande cohérence, au
fur et à mesure qu’il acquière la confiance et use de son intelligence et son sens politique. Son interprète, Tahar  Rahim, est une vraie révélation, s’emparant totalement du rôle, bluffant de vérité. Son duel avec le toujours impressionnant Niels Arestrup, est un régal. Etonnant que le jury Cannois lui ait préféré Waltz, même si celui-ci livre une performance haut de gamme dans le Tarantino.
De toute évidence, Un prophète aurait fait une Palme d’or difficilement contestable. On a donc hâte de voir le Ruban blanc…

INGLORIOUS BASTERDS – 6,5/10

 
Inglourious Basterds
 
Synopsis : Dans la France occupée de 1940, Shosanna Dreyfus assiste à l’exécution de sa famille tombée entre les mains du colonel nazi Hans Landa. Shosanna s’échappe de justesse et s’enfuit à Paris où elle se construit une nouvelle identité en devenant exploitante d’une salle de cinéma.
Quelque part ailleurs en Europe, le lieutenant Aldo Raine forme un groupe de soldats juifs américains pour mener des actions punitives particulièrement sanglantes contre les nazis. "Les bâtards", nom sous lequel leurs ennemis vont apprendre à les connaître, se joignent à l’actrice allemande et agent secret Bridget von Hammersmark pour tenter d’éliminer les hauts dignitaires du Troisième Reich. Leurs destins vont se jouer à l’entrée du cinéma où Shosanna est décidée à mettre à exécution une vengeance très personnelle…
 
Avis : Dans le style, Tarantino ne se renouvelle pas vraiment, et on est même assez fréquemment proche de la redite. Longs dialogues inspirés, prédominance d’une musique western, scènes de baston très chorégraphiées où la violence rivalise au burlesque, récit chapitré où les différents personnages ne font généralement que se croiser. Un petit goût de déjà vu, certes, mais savoureux. Et comme l’écrin est inédit, on ne boude pas son plaisir. Car si on départ Tarantino voulait fixer son histoire dans la grande, il a finalement décider de la réecrire. Une démarche intrigante et culottée, mais qui fonctionne, car il indique clairement dès le départ que l’on est dans le faux, l’outrance et l’exagération.
Et Tarantino prend le risque de mélanger les langues, ce qui rajoute à la véracité du récit et à la force de l’histoire, aidé par un casting dense, et souvent brillant (Pitt, Laurent dans un rôle peu évident, la révélation  Watlz, prix d’interprétation à Cannes mérité, mais aussi tous rôles satellites).
S’il ne se réinvente pas, QT signe un babel ludique, un peu bavard, parfois brillant, surtout divertissant.

JUSQU’A TOI – 4,5/10

 

Jusqu'à toi

 
Synopsis : Chloé, 26 ans, vit seule à Paris, entre une voisine envahissante, une collègue mesquine, un loueur de DVD un peu donneur de leçons… Une vie qui n’est pas à la hauteur de ses espérances…
Jack, la trentaine, Américain largué par sa copine, gagne un séjour à Paris.
Chloé va alors, par un heureux hasard, récupérer la valise de Jack, celle que lui a légué son père et à laquelle il tient plus que tout. Et tomber amoureuse de son contenu…
Chloé aime Jack, même si elle ne l’a jamais vu, même si elle ne sait rien de lui. Elle se persuade qu’il est l’homme de sa vie, qu’ils sont faits l’un pour l’autre, et elle va tout faire pour le retrouver…
 
Avis : Une comédie romantique au pitch séduisant… mais alors qu’est-ce que c’est mou! Un rythme plus que poussif, des acteurs apathiques, pas aidés, il faut le dire, par des dialogues souvent pesants et des musiques souvent utilisées à contre-temps. Tristoune.

L’AN 1, DES DEBUTS DIFFICILES – 5,5/10

 

L'An 1 : des débuts difficiles

 
Synopsis : Au tout début de notre ère, Zed et Oh, deux "chasseurs-cueilleurs" pas vraiment dégourdis, sont bannis de leur village natal par leurs congénères. Feignants, peureux et incapables de chasser, les deux compères se retrouvent livrés à eux-mêmes dans un environnement hostile, sans nulle part où aller. Ils décident, par conséquent, de quitter l’endroit qu’ils ont toujours connu pour s’aventurer vers l’inconnu…
 
Avis : Après un début savoureux qui reprend les codes des films Apatow (humour potache, personnages à la marge d’une société normée), le film perd sa spontanéïté dans le périple parodico-bilbique et l’ensemble prend un tour laborieux, autant dans le déroulement d’un scénario assez paresseux, qui cède souvent à la facilité, que par l’enchaînement de gags flirtant dangeureusement avec un humour scato limite. Ceci dit, pour peu qu’on soit sensible  au talent comique survolté inné de Jack Black (ce qui est mon cas), sa présence au générique compense en partie les faiblesses du film.

PARTIR – 7/10

 

Partir

 
Synopsis : Suzanne a la quarantaine. Femme de médecin et mère de famille, elle habite dans le sud de la France, mais l’oisiveté bourgeoise de cette vie lui pèse. Elle décide de reprendre son travail de kinésithérapeute qu’elle avait abandonné pour élever ses enfants et convainc son mari de l’aider à installer un cabinet. A l’occasion des travaux, elle fait la rencontre d’Ivan, un ouvrier en charge du chantier qui a toujours vécu de petits boulots et qui a fait de la prison. Leur attraction mutuelle est immédiate et violente et Suzanne décide de tout quitter pour vivre cette passion dévorante.
 
Avis : Partir est de ces films qui nous surprennent par l’intensité qu’ils dégagent et la tension permanente qu’il distille. Pourtant, l’histoire est tout ce qu’il y a de plus banale, drame de la vie conjugale maintes fois débattu. Une femme mariée, mère de famille aisée, succombe à la passion d’un ouvrier fauché. Et décide de tout plaquer pour partir avec lui. Rien de bien original, certes. Mais en jouant sur les ellipses qui cassent le récit en autant de moments clefs, sur une photo et des plans enveloppants les deux amants d’une urgence palpable, Catherine Corsini parvient à donner à son film un air de thriller psychologique efficace, sensuel  et captivant. Elle le doit à un montage sec, à une musique subtile accompagnant la fuite de Suzanne et à une réalisation sobre et élégante, baignée par la lumière du Sud. Mais aussi et surtout à son casting impeccable. L’improbable couple Lopez/Scott Thomas fonctionne comme une évidence, et Attal, en mari cocu et pervers est très convaincant. Après Il y longtemps que je t’aime, Kristin Scott Thomas éclabousse une nouvelle fois le film de sa classe et de son talent. Froide et marquée dans le film de Claudel, elle est ici d’une beauté irradiante, légère et espiègle comme une ado au début de la passion, ravagée et déterminée lorsqu’il s’agit pour elle de l’assumer. D’une expressivité rare, l’actrice raconte les sentiments qui habitent Suzanne en peu de mots mais seulement par un haussement de cils, un sourire, un regard perdu, un mouvement du corps…
Alors tant pis si la crédibilité n’est pas le principal atout du film. La tension permanente que diffuse ce jeu à 3 royalement interprété suffit à notre bonheur de spectateur.

LA HAUT – 7.5/10

Réalisé par Pete Docter, Bob Peterson

Là-haut

Synopsis : Quand Carl, un grincheux de 78 ans, décide de réaliser le rêve de sa vie en attachant des milliers de ballons à sa maison pour s’envoler vers l’Amérique du Sud, il ne s’attendait pas à embarquer avec lui Russell, un jeune explorateur de 9 ans, toujours très enthousiaste et assez envahissant… Ce duo totalement imprévisible et improbable va vivre une aventure délirante qui les plongera dans un voyage dépassant l’imagination.
 
Avis : Encore une fois, les génies de Pixar démontrent qu’ils n’ont pas d’équivalent dans le monde de l’animation en 3D et qu’ils restent bien au dessus des leurs petits camarades de Dreamworks ou de Fox. Si l’animation est à tomber à la renverse, d’une beauté et d’une créativité dingue, ce n’est finalement pas le principal atout du film. Ce qui porte Là-haut tout, tout là haut, c’est sont histoire, son humour, sa tendresse, son honnêteté aussi. On oublie très vite la technique pour se laisser portés par l’histoire.
Cueillis à  froid par la bouleversante séquence d’introduction, toute une vie résumée en 6 minutes, c’est la larme à l’œil qu’on part à l’aventure avec ce vieillard acrimonieux et ce scout jovial et malhabile. Remarquablement bien dialogué, le film associe humour ravageur et aventure trépidante, tout en délivrant une réflexion simple mais efficace et subtile sur le temps qui passe, la solitude, mais aussi la chute des idoles et les désillusions que peuvent susciter les rêves d’enfants.
La force de Pixar est de ne jamais se reposer sur ses lauriers, se réinventer toujours, surprendre en permanence. Et prendre des risques. Il en fallait du culot pour faire d’un papy grognon et un gamin rondouillard les héros d’un long métrage Disney.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que c’est une réussite. Eclatante.