Séries | HOUSE OF THE DRAGON S01 – 16/20 | LA GUERRE DES MONDES S03 – 14/20 | DÉSORDRES S01 – 13,5/20

Chroniques

HOUSE OF THE DRAGON S01 (OCS) – 16/20

Prequel évènement à Game of Throne, HoD vous plonge instantanément en terrain connu. Conspirations, trahisons successions, les 7 couronnes, les twists… et beaucoup de dragons. On retrouve avec confort et excitation Port Royal et Westerlos.
HoD est un soap grandiose, une fresque familiale violente d’une ampleur rare qui dispose de tous les ingrédients pour tenir en haleine son spectateur. Une tragédie remarquablement bien écrite, que la prolifération de personnages sur plusieurs générations ne rend miraculeusement pas (trop) incompréhensible. La série traite moins des enjeux géopolitiques que GoT, sans doute parce qu’elle a été moins « pensée » en amont, mais en se concentrant sur les maisons Targaryen, Valaryon et Hightower, elle réussit à être une fable politico-familiale dense et passionnante. Et le dernier épisode laisse deviner une seconde saison qui devrait s’ouvrir sur les autres maisons et les jeux d’alliance. Ce qui marque aussi dans HoD, c’est l’absence de manichéisme, il n’y pas de gentils ou de méchants pour lesquels le spectateur prendrait parti. Ils sont presque tous dans une zone grise.
On pardonne facilement quelques inconstances sur les effets des sauts dans le temps selon les personnage et l’existence même de Ser Criston, seul personnage raté. Cette première saison révèle d’ailleurs d’excellents acteurs. Elle semble servir d’introduction à quelque chose de beaucoup plus grand comme son final le laisse suggérer. Il nous laisse un peu sur notre faim mais conquis. C’est loin 2024…

LA GUERRE DES MONDES S03 (Canal) – 14/20

Alors que le final de la saison 2 sonnait comme un dénouement qu’on pouvait penser définitif, la série parvient à se réinventer, à assumer plus nettement sa part SF et à jouer avec les très à la mode univers parallèles. Et elle le fait bien malgré son budget limité.
Elle gagne en efficacité, parvient à rester accrocheuse et offre à ses spectateurs une conclusion plus que décente. Une belle série.

DÉSORDRES S01 (Canal) – 13,5/20

Foresti réussit beaucoup mieux le passage à la série auto-biographique que Blanche Gardin. Désordres est définitivement du Foresti, mais bien emballé, avec un effort sur le scénario et le rythme. C’est surtout vrai dans un premier épisode vraiment hilarant. Le niveau baisse sensiblement par la suite, certains épisodes sont même gênants ou pesant lorsque la dépression de l’humoriste prend trop de place (épisode 7 cafardeux….). Mais la série reste drôle la plupart du temps, Foresti ayant aussi la bonne idée de bien s’entourer, de sa bande de copines « à la Sex and the City » aux guests comme Audrey Lamy. Des hauts et des bas, mais globalement une réussite.

Cinéma | LE PETIT NICOLAS : QU’EST-CE QU’ON ATTEND POUR ÊTRE HEUREUX? – 14/20

De Amandine Fredon, Benjamin Massoubre
Avec Alain Chabat, Laurent Lafitte, Simon Faliu

Chronique : Héros transgénérationnel que de récentes adaptations live ont quelque peu affadi (sans être honteuses cela dit), le Petit Nicolas retrouve sous la plume d’Amandine Fredon et Benjamin Massoubre la saveur et l’espièglerie des romans illustrés de notre enfance, désuets mais absolument charmant.
Le film emprunte un angle narratif original pour raconter les aventures de Nicolas et de ses copains. Il commence par aborder l’amitié entre Sempe et Gosciny et leurs discussions d’où l’idée du personnage est née. Ils dialoguent tour à tour avec leur création, répondent à ses questions et lui racontent leur vie. Ils nous font voyager entre les histoires personnelles des deux artistes et les aventures les plus célèbres de l’écolier malicieux. L’animation est d’une fidélité et d’une déférence absolue aux dessins de Sempé. Les transitions entre passage biographique et fiction sont souvent ingénieuses et inventives, jouant sur les différentes étapes de la confection d’une planche. Les dessins à l’aquarelle sont de tout beauté. Le tout est accompagné d’une bande son jazzy et nostalgique toujours à propos.
Un poil anachronique certes, mais Le Petit Nicolas – Qu’est-ce qu’on attend pour être heureux est un hommage poétique et touchant d’une infinie loyauté, autant à l’œuvre qu’à ses créateurs.

Synopsis : Penchés sur une large feuille blanche quelque part entre Montmartre et Saint-Germain-des-Prés, Jean-Jacques Sempé et René Goscinny donnent vie à un petit garçon rieur et malicieux, le Petit Nicolas. Entre camaraderie, disputes, bagarres, jeux, bêtises, et punitions à la pelle, Nicolas vit une enfance faite de joies et d’apprentissages. Au fil du récit, le garçon se glisse dans l’atelier de ses créateurs, et les interpelle avec drôlerie. Sempé et Goscinny lui raconteront leur rencontre, leur amitié, mais aussi leurs parcours, leurs secrets et leur enfance.

Séries | BLACK BIRD – 15/20 | SHE HULK S01 – 07/20 | DAHMER – 13/20

BLACK BIRD (AppleTV+) – 15/20

Inspiré d’un fait divers ahurissant, Black Bird raconte comment un petit trafiquant tchatcheur se voit confier une mission d’infiltration non-officielle contre une remise de peine. Son but, faire parler un serial-killer pour qu’il se confie et lui indique où il a enterré ses victimes.
Le traitement est assez proche Mindhunter, même si l’exécution est moins raffinée. Mais le rapprochement entre Jimmy et Larry Hall est tout aussi passionnant. La réussite de Black Bird est de ne jamais laisser paraître le monstre sous un jour favorable. Malgré ses airs de gros nounours un peu benêt, Hall est glaçant, effroyable. Son interprétation par Paul Walter Hauser (Le Cas Richard Jewell) est démente. Taron Egerton, tout en muscle, se hisse à son niveau, son visage marqué passant de l’arrogance à une peur pure et primale.
Court, mais efficace, à l’image de la plupart dramas ultra qualitatifs d’AppleTV+

SHE HULK S01 (Disney+) – 07/20

Dans la lignée des dernières productions Marvel (ciné ou TV), She Hulk s’avère aussi fainéante que poussive, quand elle n’est pas simplement gênante. Présentée comme une comédie procédurale à la Ally McBeal, elle ne s’en approche jamais, même de loin. Il n’y a quasiment jamais de scène de procès qui mettent en valeur Jenifer l’avocate. La série n’a rien à raconter, où elle le fait mal, de manière expéditive et désordonnée. Pire, à l’image de Thor 4 il y a peu, She Hulk ternit l’image de personnages Marvel jusqu’à là solides, comme Wong ou Daredevil qui se ridiculisent dans cette bouffonnerie. Et on ne parle pas des effets spéciaux, affligeants.
L’idée que Jen brise le 4ème mur était intéressante, mais elle est traitée en dilettante, sans but précis. Dommage car ses actrices, Tatiana Maslany et Jameela Jamil en tête, méritaient beaucoup mieux.
À force de survendre ses projets comme des éléments essentielles au grand TOUT (le MCU), de privilégier la quantité à la qualité, Marvel a totalement perdu le fil, accumulant les productions d’une effrayante vacuité que des CGI bâclés ne suffisent plus à sauver. Espérons que Black Panther 2 les remettent sur le bon chemin, celui d’une réelle vision artistique alliée à un solide story-telling. No Way Home mis à part, ce n’est pas arrivé depuis Endgame.


DAHMER (Netflix) – 13/20

Ryan Murphy aime l’horreur et les histoires criminelles. Jeffrey Dahmer est un donc un perfect match pour le showrunner. Il rend compte sur 9 épisodes de la psyché tordue et dérangée du serial killer, relate son enfance difficile, détaille son modus operandi obscène. Surtout, il mesure l’impact des actions de Dahmer sur son entourage, sur ses voisins, sa famille et celles de ses victimes. Mais il ne s’agit pas uniquement d’une histoire de serial killer, la série rend aussi compte du racisme systémique aux Etats-Unis, comment la parole des minorités y est ignorée. Et en quoi cela explique pourquoi le tueur a pu agir si longtemps en toute impunité.
On peut difficilement faire plus glauque, et Evan Peters incarne parfaitement le tueur, mais étrangement elle est moins malaisante que The Assassination of Versace, une autre série de Ryan Murphy. Le personnage de Andrew Cunanan interprété par Darren Criss avait un degré de perversité encore plus dérangeant, le genre à vous mettre mal à l’aise bien après avoir vu la série.
Dahmer est plus frontal, plus documentaire, ce qui lui confère une certaine distance. Mais on reste quand même à un haut niveau de psychopathie.

Cinéma | L’INNOCENT – 14/20

De Louis Garrel
Avec Roschdy Zem, Anouk Grinberg, Noémie Merlant

Chronique : Comédie de gangster burlesque enlevée et futée, L’Innocent s’avère également convaincant lorsqu’il explore avec humour les liens mère-fils. Malgré quelques temps faibles, le film est parcouru de nombreuses fulgurances. La finesse de ses dialogues, pensés comme autant de passes d’armes, alliée à l’intelligence de sa mise en scène lui donnent de la cohérence et une sacrée prestance malgré son apparence modeste. Garrel utilise les arrières plans de ses champ-contrechamps comme autant de ressorts comiques et ne perd jamais de vue ses personnages. Surtout, au cœur de ce récit de braquage de branques, l’auteur-acteur-réalisateur articule un jeu de dupes d’un romantisme fou.
Un heureux mélange des genres qui transpire l’amour du jeu et ne pouvait fonctionner sans des interprètes à la hauteur, et à ce niveau c’est un sans-faute. Noémie Merland est lumineuse et hilarante, Anouk Grinberg touchante en mère-poule flanquée d’un indécrottable optimisme, Roschdy Zem parfait en petit bandit faussement repenti et Louis Garrel s’offre un rôle sur-mesure en naïf romantique sur mesure. Et pour ne rien gâcher, il filme très bien Lyon.
Une réussite. Oui, Louis Garrel est franchement drôle

Synopsis : Quand Abel apprend que sa mère Sylvie, la soixantaine, est sur le point de se marier avec un homme en prison, il panique. Épaulé par Clémence, sa meilleure amie, il va tout faire pour essayer de la protéger. Mais la rencontre avec Michel, son nouveau beau-père, pourrait bien offrir à Abel de nouvelles perspectives…

Cinéma | NOVEMBRE – 14,5/20

De Cédric Jimenez
Avec Jean Dujardin, Anaïs Demoustier, Sandrine Kiberlain

Chronique : S’emparer de l’histoire récente pour en faire une œuvre de fiction est un phénomène assez récent dans le cinéma français. Mais il semble progressivement se défaire de cette pudeur naturelle et ne plus craindre de regarder son époque en face, comme savent le faire les Américains (avec plus ou moins de bon goût).
Les attentats du 13 novembre sont encore très frais dans la conscience collective, ce qui explique l’extrême précaution avec laquelle Novembre les traite. Les attaques elles-mêmes sont uniquement évoquées, les victimes furtivement croisées. Cédric Jimenez s’intéresse exclusivement aux forces de polices engagées sur l’enquête et livre un thriller intense et haletant condensé sur 1h40, sans gras, concis, une plongée en apnée dans les services anti-terroristes français.
Solidement documenté, le film s’appuie sur une réalisation très maîtrisée, sans baisse de rythme, et une mise en scène sèche et ample pour raconter dans le détail cinq jours d’une traque sans relâche et parfois fébrile. Dans des styles différents, quelques scènes marquent profondément les esprits. Parmi elles, l’une des premières où les téléphones sonnent dans le vide avant la tempête qui s’annonce, ou l’assaut final, impressionnant.
Jimenez excelle dans le déploiement des scènes d’action, et convainc à traduire la tension et l’épuisement qui gagne les équipes. Il peut s’appuyer pour cela sur un casting solide qui mixe les générations d’acteurs (Kiberlain, Dujardin, Renier pour les anciens, Demoustier, Khoudry, Outablbali, Khammes pour la nouvelle génération). Tous font preuve d’une salutaire et remarquable sobriété (même Dujardin, oui), tout en parvenant à transmettre l’émotion nécessaire.
Novembre est un thriller passionnant mais du fait de son sujet qui résonne encore fortement chez chacun d’entre nous, il est dur, éprouvant. Il démontre aussi que le cinéma français est désormais capable de se hisser au niveau de films américains tels que Zero Dark thirty ou du cinéma de Paul Greengrass. Et c’est encourageant.

Synopsis : Une plongée au cœur de l’Anti-Terrorisme pendant les 5 jours d’enquête qui ont suivi les attentats du 13 novembre.

Cinéma | L’ORIGINE DU MAL – 13/20

Par Sébastien Marnier
Avec Laure Calamy, Doria Tillier, Dominique Blanc, Jacques Weber

Chronique : Sébastien Marnier excelle dans l’installation d’ambiances étranges, pesantes et anxiogènes, il l’a déjà démontré dans les très réussis Irréprochable et L’heure de la sortie.
Avec l’Origine du mal, il y ajoute une pointe de cynisme et d’humour très noir, pour composer un thriller vénéneux disséquant les névroses d’une grande famille bourgeoise.
Certes, le scénario fonctionne moi bien que dans ses précédents films. Le récit est parfois un peu haché et l’intrigue peut paraître fuyante, son background et les révélations manquant d’originalité.
Mais le soin qu’apporte le réalisateur à sa mise en scène, le sarcasme de ses dialogues piquants et sa brillante direction d’acteur comblent assez largement ces faiblesses dans l’écriture.
Il joue des fausses pistes et de faux semblants pour instaurer un malaise palpable, au sein duquel se déplace une galerie de monstres impeccablement tenus par des comédiens tous très impressionnants. La grande, l’immense Dominique blanc apporte toute sa théâtralité, Laure Calamy sa (fausse?) naïveté et sa folie, Doria Tillier sa beauté froide et Jacques Weber la monstruosité de son charisme naturel. Ils sont tous pleinement dévoués à l’histoire qu’ils racontent et Sebastien Marnier en tire le meilleur de chacun.
Ce 3ème film le confirme comme l’un de plus solide porte-drapeau d’un cinéma de genre français riche et vivace.

Synopsis : Dans une luxueuse villa en bord de mer, une jeune femme modeste retrouve une étrange famille : un père inconnu et très riche, son épouse fantasque, sa fille, une femme d’affaires ambitieuse, une ado rebelle ainsi qu’une inquiétante servante.
Quelqu’un ment.
Entre suspicions et mensonges, le mystère s’installe et le mal se répand…

Cinéma | LE SIXIÈME ENFANT – 14/20

De Léopold Legrand
Avec Sara Giraudeau, Benjamin Lavernhe, Judith Chemla, Damien Bonnard

Chronique : Le 6ème enfant est un premier film intense, saisissant et parfois déroutant sur le désir d’enfant. Le scénario tisse le fil de cet arrangement insensé avec toute l’ambiguïté qu’il suggère, exposant les motivations intimes qui mèneront à cet impensable accord sans jamais le cautionner.
Il traite en revanche avec toute la retenue possible de la douleur qui pèse sur ces deux femmes, l’une désespérée de ne pas avoir d’enfant et l’autre effrayée à l’idée d’être incapable d’élever le siens. Naviguant entre les thématiques puissantes de la maternité, la filiation et l’adoption, Le 6ème Enfant décrypte l’engrenage infernal dans lequel elles sombrent et dont elles ne peuvent s’extirper et nous tient en haleine jusqu’à son dénouement. Car si on condamne, on ne peut qu’être touchés par leur histoire. Le film ne sombre jamais dans la caricature du choc sociétal (les bobos et les gitans), et c’est sans aucun doute autant grâce à la sobriété de sa mise en scène, sans pathos, frontale, qu’à la justesse de son quatuor d’acteurs épatant d’intensité et d’humanité. La moindre fausse note pourrait tout gâcher. Elle n’arrive jamais. Sara Giraudeau, Benjamin Lavernhe, Judith Chemla, Damien Bonnard, tous impressionnent.
Immoral, certainement. Poignant forcément.

Synopsis : Franck, ferrailleur, et Meriem ont cinq enfants, un sixième en route, et de sérieux problèmes d’argent. Julien et Anna sont avocats et n’arrivent pas à avoir d’enfant. C’est l’histoire d’un impensable arrangement.

Cinéma | DON’T WORRY DARLING – 13,5/20

De Olivia Wilde
Avec Florence Pugh, Harry Styles, Chris Pine

Chronique : Thriller SF et paranoïaque aux atours rétro, Don’t Worry Darling est à la fois bien écrit, joliment réalisé et solidement interprété. Sa réalisatrice Olivia Wilde crée avec Victory une vision fantasmée des banlieues pavillonnaires américaines (très inspirée de Palm Spring), une image d’Épinal aseptisée de l’American Way of life qu’elle va s’empresser de tordre pour vite suggérer que quelque chose ne tourne pas rond. Des questions affleurent comme autant de sources d’angoisse. Où vont les hommes, sur quoi travaillent-ils, pourquoi ne peut-on pas sortir de Victory?
Grâce à sa mise en scène graphique et inspirée, Olivia Wilde plonge progressivement son héroïne dans une troublante confusion, brouille sa perception, les musiques légères des fifties se confondent bientôt avec des airs plus tourmentés, les couleurs pastelles s’assombrissent, l’environnement réconfortant devient menaçant. Elle sait définitivement filmer et imposer une vision. Au-delà des rumeurs ayant entouré la production du film, elle exploite parfaitement le talent de « miss Flo » (Florence Pugh), une des actrices les plus complètes et inspirante de la nouvelle génération. Elle est encore une fois excellente, aussi bien pour traduire le climat anxiogène qui s’installe à Victory que pour véhiculer le message féministe et anti-patriarcal du film.
Si l’histoire elle-même manque d’un peu d’ampleur et que la dramaturgie peut apparaitre parfois un peu artificielle pour faire de Don’t Worry Darling un grand film, il impose indéniablement Olivia Wilde comme une réalisatrice qui compte.

Synopsis : La chronique d’une communauté isolée dans le désert californien en plein coeur des années 1950, au sein de laquelle une femme au foyer voit sa vie être chamboulée.