AMOUR – 15,5/20

AmourRéalisé par Michael Haneke
Avec Jean-Louis Trintignant, Emmanuelle Riva, Isabelle Huppert

Synopsis : Georges et Anne sont octogénaires, ce sont des gens cultivés, professeurs de musique à la retraite. Leur fille, également musicienne, vit à l’étranger avec sa famille. Un jour, Anne est victime d’une petite attaque cérébrale. Lorsqu’elle sort de l’hôpital et revient chez elle, elle est paralysée d’un côté. L’amour qui unit ce vieux couple va être mis à rude épreuve.

Avis : Un choc. Au sens propre. On en ressort essoré, vidé, exsangue, sonné. Amour est une expérience violente, une immersion dans un huis-clos mortifère d’une brutalité inouïe. Haneke ne nous épargne rien de l’agonie de Anne, son irréversible décadence physique, sa colère rapidement impossible à traduire si ce n’est pas des cris incompréhensibles et du désarroi de Georges. Au rythme de longs plans séquence lourds de sens, le réalisateur du palmé Ruban Blanc traduit avec une acuité chirurgicale la douleur de ces derniers mois qui semblent balayer toute une vie passée, apparemment calme et heureuse.
Sa caméra est là ou il faut, quand il faut, le temps qu’il faut, alternant plans frontaux sur Anne mourante et hors-champs peut-être encore plus désarmants. Une mise en scène d’autant plus impressionnante qu’elle se passe totalement de musique. Cet élément est loin d’être anecdotique, puisque la musique était un des piliers de la vie d’Anne qui s’effondre en même temps qu’apparait sa maladie. Haneke le suggère subtilement par une première scène de concert rétrospectivement déchirante puisqu’elle sera l’une des dernière sorties du couple. Eux, auparavant si sociables, vont s’isoler dans leur appartement (décor unique du film après cette introduction) pour affronter la maladie, puis la mort. Cet isolement est intelligemment traduit par la mise à l’écart progressive du personnage de la fille, interprétée par Isabelle Huppert.
Mais on ne peut pas parler de Amour sans évoquer ses deux acteurs principaux, immenses, dont le phrasé un peu daté impose d’emblée les personnage et résonne comme autant de poèmes crépusculaires. Trintignant est bouleversant d’abnégation et de courage. Son regard hante le film. Quand à Emmanuelle Riva, dont le beauté solaire s’étiole progressivement avec la maladie, elle livre une performance physique et émotionnelle d’une rare puissance.
Amour n’est pas un film agréable, il n’est pas distrayant, il demande aussi au spectateur une attention particulière et même un certain cran.
C’est peut-être là sa limite, on n’a pas forcément envie de s’imposer cette expérience.
Mais si on l’accepte, elle est de celles qui vous retournent le cœur.
J’aurais personnellement adressé la palme de cette année à De Rouille et d’os, mais cet Amour là se pose comme une évidence. Formellement proche de la perfection, humainement déchirant.
De ses œuvre qui ne vous laisse pas indemnes…

SKYFALL – 16/20

SkyfallRéalisé par Sam Mendes
Avec Daniel Craig, Judi Dench, Javier Bardem

Synopsis : Lorsque la dernière mission de Bond tourne mal, plusieurs agents infiltrés se retrouvent exposés dans le monde entier. Le MI6 est attaqué, et M est obligée de relocaliser l’Agence. Ces événements ébranlent son autorité, et elle est remise en cause par Mallory, le nouveau président de l’ISC, le comité chargé du renseignement et de la sécurité. Le MI6 est à présent sous le coup d’une double menace, intérieure et extérieure. Il ne reste à M qu’un seul allié de confiance vers qui se tourner : Bond. Plus que jamais, 007 va devoir agir dans l’ombre. Avec l’aide d’Eve, un agent de terrain, il se lance sur la piste du mystérieux Silva, dont il doit identifier coûte que coûte l’objectif secret et mortel…

Avis : En réinventant le mythe 007, Casino Royale avait profondément marqué les esprits et installé instantanément Daniel Craig dans le costume de James Bond. Froid, violent, sombre et humain, cette nouvelle vision de l’agent secret avait comblé à la fois les fans les plus exigeants et les néophytes. Cet enthousiasme avait été largement refroidit par le raté Quantum of Solace, plombé par un scénario faiblard et inutilement complexe.
Avec Skyfall, la saga se régénère d’une manière inespérée et n’est pas loin de livrer un de ses meilleurs crus. Et comme pour marquer sa différence, le film ne fait aucune référence à ses deux prédécesseurs, fonctionnant ainsi parfaitement par lui-même.

Spectaculaire et introspectif, dense mais compréhensible, ce 23ème opus vous scotche dès son impressionnante introduction au cœur d’Istanbul, à couper le souffle, suivi d’un générique à tomber par terre, auquel la musique d’Adèle (frissons…) donne un troublant supplément d’âme.
Pour le reste, la mise en scène de Sam Mendes, d’une classe et d’une inventivité folle,  positionne d’emblée Skyfall comme un massif et pur morceau de cinéma. Le réalisateur d’American Beauty, Jarhead et des Noces Rebelles (que des claques), n’était pas un choix évident, mais s’avère le choix parfait pour raconter cette histoire de renaissance, de mort et de vengeance, tout sauf manichéenne. Son génie pour sonder l’âme humaine donne au film une dimension mythologique qui élève la saga. Bond y découvre son alter-égo maléfique, Silva, tandis que M se retrouve au cœur d’une intrigue œdipienne digne d’un drame antique.

Si des doutes pouvaient subsister sur la capacité de Mendes à délivrer les scènes d’action, ils s’évaporent très vite (quoique Les sentiers de la Perdition donnait déjà des garantis probantes sur son habileté à filmer une violence sourde et sans fard). Il filme comme autant de chorégraphies les poursuites et les corps à corps, les fusillades et les explosions. Ces moments de bravoure succèdent avec une précision de métronome aux échanges entre les personnages souvent intenses, parfois émouvants, toujours très justes.
Des plans de toute beauté, jouant avec virtuosité des lumières et des couleurs, impriment la rétine de manière jubilatoire, délivrant des scènes immédiatement cultes, comme un combat dantesque sous les néons de Shangai ou l’attaque d’un tribunal. Mendes ne cède jamais à la mode épileptique et stroboscopique des films d’action actuels et prend le temps de dessiner à la fois une ambiance, des personnages et des situations souvent explosives.
Si bien qu’associés à un récit contracté et d’une extrême concision, la tension ne se relâche jamais jusqu’au climax final à l’ampleur saisissante. Et ce, toujours avec juste ce qu’il faut d’humour et de références iconiques propres aux aventures de l’agent du MI6. Parmi ces éléments, les mesures entêtantes du thème musicale de Bond reviennent régulièrement illustrer le récit, tantôt vrombissantes, tantôt caressantes en fonction de l’effet désiré. Et l’effet fonctionne à chaque fois. On pourra regretter la présence plutôt effacée des James Bond Girls, mais on se consolera en se disant que Skyfall révèle peut-être la plus charismatique d’entre-elles, M. Judy Dench livre en effet  une performance ambigüe, sensible et indéniablement marquante.

Mais la réussite de ce James Bond, outre ces immenses qualités formelles et narratives, tient aussi (et beaucoup) au fait que le MI6 et Bond en particulier affrontent un bad guy complexe, torturé, cynique et impitoyable, lesté d’un lourd passé et mu d’un insatiable désir de revanche. L’interprétation flamboyante de Javier Bardem (comment arrive-t-il à foutre les jetons avec une coupe de cheveux pareille ?) est un régal et finit d’assoir Skyfall comme une référence du genre.

D’ordinaire, la saga 007 se dote d’un réalisateur inédit à chaque nouvelle mission. On va croiser très fort les doigts pour qu’elle change cette habitude…

ASTERIX & OBELIX : AU SERVICE DE SA MAJESTE – 13/20

Astérix et Obélix : au service de Sa MajestéRéalisé par Laurent Tirard
Avec Gérard Depardieu, Edouard Baer, Guillaume Gallienne

Synopsis : 50 avant Jésus Christ. César a soif de conquêtes. A la tête de ses glorieuses légions il décide d’envahir cette île située aux limites du monde connu, ce pays mystérieux appelé Brittania, la Bretagne.
La victoire est rapide et totale. Enfin… presque. Un petit village breton parvient à lui résister, mais ses forces faiblissent. Cordelia, la reine des Bretons, décide donc d’envoyer son plus fidèle officier, Jolitorax, chercher de l’aide en Gaule, auprès d’un autre petit village, connu pour son opiniâtre résistance aux Romains…
Dans le village gaulois en question, Astérix et Obélix sont déjà bien occupés. Le chef leur a en effet confié son neveu Goudurix, une jeune tête à claques fraîchement débarquée de Lutèce, dont ils sont censés faire un homme. Et c’est loin d’être gagné.
Quand Jolitorax arrive pour demander de l’aide, on décide de lui confier un tonneau de potion magique, et de le faire escorter par Astérix et Obélix, mais aussi Goudurix, car ce voyage semble une excellente occasion pour parfaire son éducation. Malheureusement, rien ne va se passer comme prévu…

 Avis : Laurent Tirard offre au héros gaulois un bien joli rebond après le crime de lèse-majesté commis par le duo Langmann-Forestier pour Astérix aux Jeux Olympique. Sans tout à fait rééditer le petit miracle qui avait touché le Mission Cléopâtre de Chabat (et miracle, le mot est faible quand on voit ce qu’ont pu faire Chabat et Djamel par la suite), Tirard s’en sort plus qu’honorablement en adaptant deux albums majeurs des aventures d’Astérix.
A l’image de son travail sur le Petit Nicolas, autre personnage créé par Goscinny, le réalisateur prend soin de respecter l’œuvre originale en lui étant très fidèle dans l’esprit, tout en lui apportant ce qu’il faut de modernité grâce à des dialogues particulièrement bien écrits.
On sent de la part du réalisateur une minutie particulière apportée à son scénario, cherchant à être le plus précis possible et truffant son film de petits détails, comme bien sûr les anachronismes caractéristiques de la BD ou encore les références multiples à la culture anglo-saxonne.
Moins audacieuse que celle de Chabat, son adaptation n’en est pas moins fun  et enlevée. Elle a surtout la très bonne idée de repositionner Astérix au cœur du film, Edouard Baer lui apportant son irrésistible faconde et sa drôlerie décalée. Son duo (couple ?) avec Obélix est plus évident et efficace que jamais. Depardieu ne semble désormais ne plus faire qu’un avec Obélix et s’offre quelques scènes délicieuses.
Tous les personnages sont d’ailleurs remarquablement croqués et permettent de savourer le jeu atypique et jubilatoire d’acteurs formidables  comme Vincent Lacoste (dont je suis totalement fan depuis Les Beaux Gosses), Guillaume Gallienne ou Valérie Lemercier. Sans parler d’un Lucchini s’amusant comme un jeunot sous la couronne de lauriers de César.
A part un gros trou d’air au cœur du film due à une nette perte de rythme, Astérix au service de sa majesté ne souffre d’aucune faute de goût. Du travail bien fait.

PAPERBOY – 11,5/20

PaperboyRéalisé par Lee Daniels (I)
Avec Matthew McConaughey, Zac Efron, Nicole Kidman

Synopsis : 1969, Lately, Floride. Ward Jansen, reporter au Miami Times, revient dans sa ville natale, accompagné de son partenaire d’écriture Yardley Acheman. Venus à la demande de Charlotte, femme énigmatique qui entretient une correspondance avec des détenus dans le couloir de la mort, ils vont enquêter sur le cas Hillary Van Wetter, un chasseur d’alligators qui risque d’être exécuté sans preuves concluantes. Persuadés de tenir l’article qui relancera leur carrière, ils sillonnent la région, conduits par Jack Jansen, le jeune frère de Ward, livreur du journal local à ses heures perdues. Fasciné par la troublante Charlotte, Jack les emmène de la prison de Moat County jusqu’aux marais, où les secrets se font de plus en plus lourds. L’enquête avance au cœur de cette Floride moite et écrasante, et révèle que parfois, la poursuite de la vérité peut être source de bien des maux…

Avis : Polar poisseux et moite, PaperBoy confirme la réputation de son réalisateur, Lee Daniels, chantre du mauvais goût assumé et de la provocation.
S’appuyant sur une photographie granuleuse, reproduisant l’imagerie des films 8 mm et des polaroids, des couleurs criardes et d’une caméra tremblante et instable, Daniels confère à son film un style très personnel, qui peut facilement rebuter. Mais on peut aussi admirer l’aplomb avec lequel il l’impose.
Ne reculant devant aucun excès, ni aucune outrance, il embarque dans son histoire des acteurs qui se livrent à corps perdus dans des interprétations crasses de personnages peu reluisants.
Il parvient ainsi à donner une vision, sa vision, d’une Amérique glauque, réactionnaire et conservatrice, pas si éloignée de notre époque. On la partagera ou pas.
Le problème est que rapidement la forme prend le dessus sur le fond et qu’on on vient à se désintéresser de l’enquête policière, particulièrement mal traitée, et par conséquent de ses protagonistes. A trop en faire, il finit par lasse.
Reste que le film mérite le détour ne serait-ce que pour sa direction d’acteurs, et les performances dantesques du casting. Zac Efron s’encanaille avec un plaisir et une aisance incontestable, Matthew McConaughey confirme ses dernières prestations bluffantes, Macy Gray épate et Nicole Kidman semble vivre une deuxième jeunesse depuis Rabbit Hole. Culottée, audacieuse, trash et sexy (et débotoxée), elle renvoie le message, au cas ou certains ne l’aurait pas entendu. La patronne, c’est elle, et elle est de retour.

TED – 14/20

TedRéalisé par Seth MacFarlane
Avec Mark Wahlberg, Mila Kunis, Seth MacFarlane

Synopsis : À 8 ans, le petit John Bennett fit le voeu que son ours en peluche de Noël s’anime et devienne son meilleur ami pour la vie, et il vit son voeu exaucé. Presque 30 ans plus tard, l’histoire n’a plus vraiment les allures d’un conte de Noël. L’omniprésence de Ted aux côtés de John pèse lourdement sur sa relation amoureuse avec Lori. Bien que patiente, Lori voit en cette amitié exclusive, consistant principalement à boire des bières et fumer de l’herbe devant des programmes télé plus ringards les uns que les autres, un handicap pour John qui le confine à l’enfance, l’empêche de réussir professionnellement et de réellement s’investir dans leur couple. Déchiré entre son amour pour Lori et sa loyauté envers Ted, John lutte pour devenir enfin un homme, un vrai !

Avis: Ted est donc un ours en peluche qui prit vie lorsque John 8 ans, fit un vœux, la veille de Noël. 27 ans plus tard, après avoir eu son heure de gloire dans les médias, il est retombée dans l’anonymat et est plus que jamais le meilleur ami de John avec qui il partage pétards et binouse, et raconte ses histoires de cul de manière totalement décomplexée. Compliqué pour la petite amie de John de se faire un place dans ce couple atypique.
Voilà le point de départ improbable de Ted. Improbable mais assez génial. En s’évitant la pesante confrontation du fantastique face au monde ordinaire, puisque le monde entier sait que Ted est une peluche vivante au début du film, Seth MacFarlane peut à peu près tout se permettre. En ne se gêne pas. Il joue à fond la carte du décalage entre le conte enfantin et la comédie potasho-trash, et ce dès le générique de début. On sent un plaisir évident à faire dire à cet adorable ours en peluche les pires horreurs.
Décalage renforcé par les innombrables références aux années 80 (si vous avez un âge approchant celui de John, vous aurez droit à votre lot de madeleines). Références directes comme Flash Gordon (aaah, Queen), et moins évidente, comme les hommages à l’univers Amblin (ET, Les Goonies, Indy). La bande son semble directement tirée d’un des classiques familiaux de Spielberg. Pour le coup, nostalgie et détournement font extrêmement bon ménage et donne une force comique imparable à l’objet.
Ça a ses limites (bien que Ted n’en ait pas lui, de limites), mais c’est foutrement drôle. Il n’y a quasiment rien à jeter des répliques de Ted, cashes, inattendues, grasses, provocantes, bref poilantes. Le revers de la médaille, c’est que les autres personnages peuvent donner l’impression de servir de faire valoir. Bien sûr, Ted est aussi une comédie sur la peur de l’engagement et le difficile ancrage dans le monde adulte. Mais cet aspect reste accessoire et traité superficiellement, se contentant de se poser en jubilatoire et assumée prétexte pour de la franche déconnade. D’ailleurs quand l’histoire s’en éloigne pour traiter des intrigues annexes (et superflues), le film connait quelques sautes de rythme qui font qu’il ne se hisse pas tout à fait au niveau des derniers étalons de la catégories (Very Bad Trip – le 1, hein – et Bridesmaid).
Ceci dit, il confirme l’excellente vitalité de la comédie US, dont l’audace est confortée par les dollars amassés au box office. Irrévérencieuse, inventive, intelligente, et irrésistiblement drôle.

DANS LA MAISON – 15/20

Dans la maisonRéalisé par François Ozon
Avec Fabrice Luchini, Ernst Umhauer, Kristin Scott Thomas

Synopsis : Un garçon de 16 ans s’immisce dans la maison d’un élève de sa classe, et en fait le récit dans ses rédactions à son professeur de français. Ce dernier, face à cet élève doué et différent, reprend goût à l’enseignement, mais cette intrusion va déclencher une série d’événements incontrôlables.

Avis : S’il y a un défaut qu’on ne peut pas reprocher à François Ozon, c’est de se répéter. Chacun de ses films est une proposition de cinéma, souvent brillante (Sitcom, Swimming pool, Potiche, Ricky), parfois ratée (8 femmes, Angel), mais toujours singulière. Détournant comme à chaque fois les codes du genre auquel il rend hommage (le boulevard, la fresque romanesque, le fantastique, le drame bourgeois, le thriller sensuel…), Ozon s’aventure cette fois-ci dans une direction quasi-hitchcockienne (hommage ouvertement assumé dans son dernier plan).

Dans la maison est une étourdissante et peu commune mise en abîme. Les spectateurs que nous sommes regardent un lecteur se perdre dans l’œuvre en permanente construction d’un auteur dont la perversité et le pouvoir manipulateur rivalisent avec son talent et son apparent angélisme adolescent.

Créant différentes strates de réalité à travers un triple niveau de narration (par le lecteur, par l’auteur, par le réalisateur…), Ozon floute la frontière entre le réel et la fiction et nous entraine un peu malgré nous dans un voyage instable, portés par le voyeurisme, les fantasmes, l’imagination. Si bien qu’il devient vite difficile de distinguer la vérité du romanesque.

Cette confusion se manifeste à travers la relation ambigüe, voire malsaine, qui se crée entre Germain, professeur de français et écrivain raté, et Claude, son élève. Si Germain est au départ fasciné par le simple talent de l’adolescent, c’est le sujet de ses écrits (la classe moyenne) qui va finir par l’obséder. Son addiction à ce récit va le faire progressivement quitter son rôle de professeur pour l’y impliquer plus qu’il ne devrait et finalement l’intégrer à l’histoire de Claude… La mise en scène flottante d’Ozon, avec une caméra qui resserre lentement ses plans sur les visages de Germain et de sa femme Jeanne, elle aussi prise au jeu, figure le piège qui se referme sur eux.

Le climat anxiogène se fait alors de plus en plus lourd au fur et à mesure que l’intrigue se noue, renforcé par un questionnement permanent sur la réalité de ce qu’on voit. Impression renforcée par le rythme très particulier imposé par les passages lus, qui créent un double langage déroutant.

Cet entre-deux précaire pourrait nous perdre, mais Ozon parvient au contraire à imposer un suspense larvé, charnel, qui nous captive autant que Germain l’est par Claude.

Un film fascinant et troublant, porté par un trio d’acteurs magistral, au cœur duquel explose le jeune Ernst Umhauer, révélation sidérante du film en ange diabolique et pervers. Il tient tête à un Luchini jamais aussi bon que lorsqu’il reste sur la réserve. Authentique, fragile, parfois pathétique. Humain. Il forme avec Kristin Scott Thomas un couple évident, dont l’histoire évolue en parallèle de celle de Claude, et prend de plus en plus d’ampleur au fil du récit. Queen Kristin (plus grande actrice du monde entier, s’il faut le rappeler), apporte sa sophistication et sa fragilité, bref sa classe absolue, à ce personnage plus complexe qu’il en à l’air.

Au final, on sort de Dans la maison un rien désorienté, avec l’impression d’avoir soi-même été manipulé. Au cinéma, ce n’est finalement pas si désagréable, quand c’est fait avec talent….

PAULINE DETECTIVE – 12,5/20

Pauline détectiveRéalisé par Marc Fitoussi
Avec Sandrine Kiberlain, Audrey Lamy, Claudio Santamaria

Synopsis : Plaquée par son petit ami, Pauline se laisse entraîner par sa sœur dans un palace de la riviera italienne. Au lieu de savourer les joies du farniente, elle se persuade qu’un crime a été commis dans l’hôtel et s’improvise détective, embarquant dans ses investigations un séduisant maître-nageur…

Avis : Comédie policière un rien surannée, Pauline Détective n’en est pas moins dénuée de charme. Si on déplore un certain nombre de trous d’air, quelques ratés dans le rythme et un scénario qu’on croirait directement adapté de la bibliothèque Rose, on finit par être séduit par cet étrange objet filmique au style rétro-naïf déroutant.
Mais Pauline Détective est avant tout porté à bout de bras par Sandrine Kiberlain qui confirme qu’elle est une excellente interprète de comédie. Elle imprime à son personnage d’emmerdeuse glamour une fraicheur et une légèreté délicieuses. Elle forme avec la parfaite Audrey Lamy un duo d’une jolie complémentarité et d’une drôlerie ravageuse.
Superficiel certes, modeste et décalé sûrement, mais savoureux.