LES MARCHES DU POUVOIR – 12,5/20

Les Marches du PouvoirRéalisé par George Clooney
Avec Ryan Gosling, George Clooney, Philip Seymour Hoffman

 

Synopsis : Stephen Meyers est le jeune mais déjà très expérimenté conseiller de campagne du gouverneur Morris, qui se prépare pour les élections à la présidence américaine. Idéaliste et décidé à faire honnêtement tout ce qu’il peut pour faire gagner celui qu’il considère sincèrement comme le meilleur candidat, Stephen s’engage totalement. Pourtant, face aux manipulations et aux coups tordus qui se multiplient vite, Stephen va devoir faire évoluer sa façon de travailler et de voir les choses. Entre tentations et désillusions, les arcanes du pouvoir le transforment…

Avis : Plutôt pas mal foutu, bien écrit, élégant et concis, Les marches du pouvoir est un bel exercice mené par Clooney pour disséquer les arcanes d’une campagne électorale, ses bassesses, les compromissions et les petits arrangements.
Sans digressions inutiles, l’acteur-réalisateur va droit au but et livre par conséquent un film politique efficace, à défaut d’être vraiment polémique. C’est sans doute le principal défaut du film, un manque de cynisme et d’un peu de malice. On n’apprend pas grand chose sur les mauvaises manières des classes dirigeantes et les ressorts dramatiques sur lesquels reposent l’intrigue (l’idéalisme déçu, l’apprentissage de la perversité des rouages politiques) ne brillent pas non plus par leur originalité.
Au delà d’un scénario solide à défaut d’être inventif, le film peut s’appuyer sur un casting royal. Autour du nouveau chouchou d’Hollywood (le très hot Ryan Gosling, encore intense et parfait), une horde de seconds rôles impeccables (Philip Seymou Hoffman, Paul Giamatti, Evan Rachel Wood, Marisa Tomei, Jeffrey Wright….) donne au film une belle densité.
Un thriller politique honnête, classieux et efficace.

LES AVENTURES DE TINTIN : LE SECRET DE LA LICORNE – 12,5/20

Les Aventures de Tintin : Le Secret de la Licorne Réalisé par Steven Spielberg
Avec Jamie Bell, Andy Serkis, Daniel Craig

Synopsis : Parce qu’il achète la maquette d’un bateau appelé la Licorne, Tintin, un jeune reporter, se retrouve entraîné dans une fantastique aventure à la recherche d’un fabuleux secret. En enquêtant sur une énigme vieille de plusieurs siècles, il contrarie les plans d’Ivan Ivanovitch Sakharine, un homme diabolique convaincu que Tintin a volé un trésor en rapport avec un pirate nommé Rackham le Rouge. Avec l’aide de Milou, son fidèle petit chien blanc, du capitaine Haddock, un vieux loup de mer au mauvais caractère, et de deux policiers maladroits, Dupond et Dupont, Tintin va parcourir la moitié de la planète, et essayer de se montrer plus malin et plus rapide que ses ennemis, tous lancés dans cette course au trésor à la recherche d’une épave engloutie qui semble receler la clé d’une immense fortune… et une redoutable malédiction. De la haute mer aux sables des déserts d’Afrique, Tintin et ses amis vont affronter mille obstacles, risquer leur vie, et prouver que quand on est prêt à prendre tous les risques, rien ne peut vous arrêter…

Avis : En adaptant les aventures du célèbre reporter belge, Spielberg savait qu’il se lançait dans un pari périlleux et qu’il était attendu avec scepticisme par les Tintinophiles du monde entier. D’ailleurs, le film se verra d’un œil différent selon qu’on est fan ou non du personnage créé par Hergé. J’ai personnellement toujours préféré les irréductibles gaulois et le poor lonesome cowboy… Comme pour les albums du journaliste à la houppette, l’histoire du Secret de la licorne a eu du mal à m’embarquer. Trop simpliste, trop peu de mystère, trop peu de surprises.
Alors qu’est-ce qui fait qu’il faut malgré tout aller voir Tintin? Parce qu’après une mise en place un peu longuette mais qui permet de se faire aux personnages en motion capture, Haddock débarque et le film prend une autre dimension, intégrant enfin humour et rythme. Et quel rythme! Spielberg fait montre de toute sa virtuosité pour créer son Tintin, moins naïf, plus vif, plus aventureux que dans la BD. Il offre des scènes de poursuite et d’action ébouriffantes, à la mise en scène inventive, précise et incroyablement maitrisée qui compense la faiblesse de l’intrigue.  Les prouesses techniques et technologiques sont impressionnantes (quel réalisme dans les regards), mais le réalisateur n’oublie pas de pas de multiplier les clins d’œil à l’œuvre originale. S’il ne peut que la réinventer, il s’efforce au maximum de lui rester fidèle.
Oui, Tintin pourrait être une sortie d’Indy Junior. Certains crieront au blasphème. D’autre que c’est une très bonne idée. Tintin en Indy Junior? Plutôt une très bonne idée.

POLISSE – 15/20

PolisseRéalisé par Maïwenn

Avec Karin Viard, Joey Starr, Marina Foïs

Synopsis : Le quotidien des policiers de la BPM (Brigade de Protection des Mineurs) ce sont les gardes à vue de pédophiles, les arrestations de pickpockets mineurs mais aussi la pause déjeuner où l’on se raconte ses problèmes de couple ; ce sont les auditions de parents maltraitants, les dépositions des enfants, les dérives de la sexualité chez les adolescents, mais aussi la solidarité entre collègues et les fous rires incontrôlables dans les moments les plus impensables ; c’est savoir que le pire existe, et tenter de faire avec… Comment ces policiers parviennent-ils à trouver l’équilibre entre leurs vies privées et la réalité à laquelle ils sont confrontés, tous les jours ? Fred, l’écorché du groupe, aura du mal à supporter le regard de Melissa, mandatée par le ministère de l’intérieur pour réaliser un livre de photos sur cette brigade.

Avis : Après son brillant Bal des actrices, Maiwenn confirme ses talents de directeur d’acteurs et livre un film coup de poing mené comme un documentaire avec une justesse remarquable. Tel un chef d’orchestre maîtrisant sa partition à la perfection, la réalisatrice enchaîne les scènes fortes aussi bien dans l’intimité des policiers que dans leur travail au quotidien, avec fureur, rage et humour parfois. Elle s’appuie et dirige des interprètes formidables d’intensité dont les personnages suscitent immédiatement l’empathie.  On a beaucoup parlé de Joey Starr, mais tous sont épatants. L’association Viard / Fois est particulièrement percutante.
On pardonnera donc à Maïwenn quelques longueurs, surtout concernant l’histoire d’amour souvent atone entre son personnage et celui de Joey Starr. On peut aussi penser que son amour pour ses acteurs l’empêche parfois de faire des coupes qui auraient pu renforcer le rythme du film. Mais ces petits défauts restent accessoires.
Choc, fort, nécessaire.

THE ARTIST – 14,5/20

The ArtistRéalisé par Michel Hazanavicius
Avec Jean Dujardin, Bérénice Bejo, John Goodman

Synopsis : Hollywood 1927. George Valentin est une vedette du cinéma muet à qui tout sourit. L’arrivée des films parlants va le faire sombrer dans l’oubli. Peppy Miller, jeune figurante, va elle, être propulsée au firmament des stars. Ce film raconte l’histoire de leurs destins croisés, ou comment la célébrité, l’orgueil et l’argent peuvent être autant d’obstacles à leur histoire d’amour.

 
Avis : Finalement, il n’y a pas grand-chose à ajouter au concert de louanges ayant accompagné la sortie de The Artist. En s’imposant un nombre de contraintes insensé pour monter ce film totalement incongru dans le paysage cinématographique actuel, Hazanavicius s’est lancé un pari fou.  Réaliser un film populaire muet, en noir et blanc et en 4:3 qui toucherait un public large.
Pari gagné. Parce qu’après les OSS, il confirme qu’il possède un don pour créer des univers uniques et ultra-cohérents au service d’une histoire forte. Entre hommage et détournements ludiques, The Artist utilise tous les codes du cinéma muet, sans jamais prétendre vouloir être fait du même bois. Il s’appuie sur les méthodes modernes pour construire son petit bijou rétro, créer des cassures dans le récit qui rajoutent à la densité dramatique du film (une scène de rêve, des jeux sur le son…) et s’amuser avec brio de la mise en abîme forcément au cœur du film. Evidemment, la performance exceptionnelle du couple Dujardin/Béjo,  incroyablement expressif, drôle et émouvant, bref charismatique, donne corps et relief au film.
Bien sûr, le principe même du film sans parole conduit à quelques redites et petites longueurs, mais franchement marginales au regard de l’impressionnant tour de force auquel on assiste, assez admiratifs, reconnaissons-le.

The Artist est un film concept, une expérience unique, un one shot qui  ne pourra logiquement pas être réédité (on doute que  le muet revienne à la mode !). Il ne pouvait que sortir de l’imagination d’un esprit forcément téméraire, ambitieux et virtuose. Mais encore fallait-il le faire et bien le faire. Hazanavicius s’en sort plus qu’avec les honneurs. Et nous laisse sans voix.

DRIVE – 16,5/20

DriveRéalisé par Nicolas Winding Refn
Avec Ryan Gosling, Carey Mulligan, Bryan Cranston

 

Synopsis : Un jeune homme solitaire, « The Driver », conduit le jour à Hollywood pour le cinéma en tant que cascadeur et la nuit pour des truands. Ultra professionnel et peu bavard, il a son propre code de conduite. Jamais il n’a pris part aux crimes de ses employeurs autrement qu’en conduisant – et au volant, il est le meilleur !
Shannon, le manager qui lui décroche tous ses contrats, propose à Bernie Rose, un malfrat notoire, d’investir dans un véhicule pour que son poulain puisse affronter les circuits de stock-car professionnels. Celui-ci accepte mais impose son associé, Nino, dans le projet.
C’est alors que la route du pilote croise celle d’Irene et de son jeune fils. Pour la première fois de sa vie, il n’est plus seul.
Lorsque le mari d’Irene sort de prison et se retrouve enrôlé de force dans un braquage pour s’acquitter d’une dette, il décide pourtant de lui venir en aide. L’expédition tourne mal…
Doublé par ses commanditaires, et obsédé par les risques qui pèsent sur Irene, il n’a dès lors pas d’autre alternative que de les traquer un à un…

Avis : Drive est une pépite d’autant plus précieuse que le film joue sur un fil qui peut constamment le faire basculer  du côté du grotesque comme du splendide.
L’accumulation de talents à l’écran le situe très vite du bon côté.
Drive baigne dans une délicieuse ambiance rétro, illustrée par son incroyable bande originale à laquelle la puissance du film doit beaucoup.

La réalisation est aussi à l’avenant, originale, chiadée, extrêmement  travaillée. Cela pourrait faire trop s’il ne se créait pas immédiatement un univers très personnel, presque anachronique au regard de la production cinématographique actuelle. Les plans sont souvent soit d’une beauté sidérante soit d’une vivacité jubilatoire, selon que l’on soit ou non dans l’action. Un montage nerveux peut succéder à un ralenti classieux sans dénaturer l’œuvre. Le jeu sur les lumières, omniprésent, travaille également à créer cet univers assez inédit.
L’histoire peut paraître assez minimaliste, mais elle est transcendée par le style de Refn  qui fait de ce thriller mafieux aux airs seventies, un western moderne, brutal, sans concession et paradoxalement profondément poétique.
Si le réalisateur n’épargne pas aux spectateurs une violence brute, il parvient à imposer un romantisme percutant et bouleversant en construisant petit à petit la romance contrariée entre le chauffeur taiseux et sa voisine.  Si cela fonctionne si bien, c’est qu’une alchimie incontestable se dégage du couple hautement charismatique créé par Ryan Gosling et Carey Mulligan. Une scène, dans un ascenseur, suffit à elle seule à faire la démonstration de leur immense et éclatant talent. Leurs visages y traduisent en moins d’un instant la prise de conscience d’un monde, d’un espoir qui s’écroule.
Leur interprétation est de celle qui marque la pellicule et les esprits pour longtemps.
Oui, Drive est bien la claque annoncée. Et elle vaut franchement le coup d’être reçue…

ET MAINTENANT ON VA OU? – 14,5/20

Réalisé par Nadine Labaki
Avec Nadine Labaki, Claude Msawbaa, Leyla Fouad

Et maintenant on va où ?

Synopsis : Sur le chemin qui mène au cimetière du village, une procession de femmes en noir affronte la chaleur du soleil, serrant contre elles les photos de leurs époux, leurs pères ou leurs fils. Certaines portent le voile, d’autres une croix, mais toutes partagent le même deuil, conséquence d’une guerre funeste et inutile. Arrivé à l’entrée du cimetière, le cortège se sépare en deux : l’un musulman, l’autre chrétien.
Avec pour toile de fond un pays déchiré par la guerre, Et maintenant on va où ? raconte la détermination sans faille d’un groupe de femmes de toutes religions, à protéger leur famille et leur village des menaces extérieures. Faisant preuve d’une grande ingéniosité, inventant de drôles de stratagèmes, unies par une amitié indéfectible, les femmes n’auront qu’un objectif : distraire l’attention des hommes et leur faire oublier leur colère et leur différence. Mais quand les événements prendront un tour tragique, jusqu’où seront-elles prêtes à aller pour éviter de perdre ceux qui restent ?

Avis : En racontant comment les femmes de deux communautés tentent par tous les moyens d’empêcher que le conflit religieux qui gangrène leur pays ne gagne les  habitants de leur village, Nadine Labaki offre un film à la fois intelligent,  léger et grave, à l’esthétique et au rythme très convaincants. La scène d’ouverture, magnifique chant mortuaire de ses femmes meurtries qui se dirigent vers le cimetière où reposent leurs maris, frères ou fils, chrétiens et musulmans, pose d’emblée  les ambitions du film. La réalisation est sophistiquée, tonique et enthousiasmante. Des chants viennent  alléger  l’histoire, comme autant de respirations entre les délicieuses discussions de femmes dignes d’un Desperate Housewives libanais et les conséquences dramatiques de la défiance entre les deux communautés.
Sans jamais se départir d’un humour souvent salvateur, la réalisatrice ne cherche pas non plus à nier la complexité et l’absurdité d’une guerre qui pousse des voisins à s’entretuer. Si le récit ne peut échapper à une certaine naïveté et quelques clichés (les hommes sont brutaux et guerriers, les femmes travaillent à la paix et la réconciliation), la réalisatrice n’a pas non plus la prétention d’avoir la solution pour résoudre le conflit.
Mais en apportant sensibilité et humanité, elle insinue l’idée qu’un espoir est permis.
Une parabole attachante, drôle et poignante sur la tolérance. D’une rare élégance.

CRAZY, STUPID, LOVE – 13/20

Réalisé par John Requa, Glenn Ficarra
Avec Steve Carell, Ryan Gosling, Julianne Moore

Synopsis : A tout juste quarante ans, Cal Weaver mène une vie de rêve – bonne situation, belle maison, enfants formidables et mariage parfait avec sa petite amie du lycée. Mais lorsqu’il apprend que sa femme, Emily, le trompe et demande le divorce, sa vie « parfaite » s’écroule. Pire, dans le monde des célibataires d’aujourd’hui, Cal, qui n’a plus dragué depuis des lustres, se révèle un modèle d’anti séduction. Passant désormais ses soirées à bouder tout seul au bar du coin, l’infortuné Cal est pris en main comme complice et protégé d’un séduisant trentenaire, Jacob Palmer. Pour l’aider à oublier sa femme et à commencer une nouvelle vie, Jacob tente de faire découvrir à Cal les nombreuses perspectives qui s’offrent à lui : femmes en quête d’aventures, soirées arrosées entre copains et un chic supérieur à la moyenne.
Cal et Emily ne sont pas les seuls en quête d’amour: le fils de Cal, Robbie, 13 ans, est fou de sa babysitter de 17 ans, Jessica, laquelle a jeté son dévolu… sur Cal ! Et en dépit de la transformation de Cal et de ses nombreuses nouvelles conquêtes, la seule chose qu’il ne peut changer reste son coeur, qui semble toujours le ramener à son point de départ.

Avis : Crazy, stupid Love est ce que les professionnels du cinéma appellent de manière un peu barbare une Dramédie, mélange de drame et de comédie. Alors si vous voulez découvrir ce qu’est une dramédie réussie, allez donc voir Crazy, Stupid, Love, car il rassemble un sacré nombre de facteurs de succès.

Passant avec une remarquable aisance du rire à l’émotion, le film parvient surtout à créer une galerie de personnages tous crédibles et attachants. Et pas seulement le duo principal. Tous sont impeccablement bien écrits et servent particulièrement bien leurs interprètes. Or, comme les acteurs sont tous formidables, que le casting frôle la perfection et que les dialogues sont fins et efficaces, forcément, on y croit (on est même surpris parfois…). Steve Carrel confirme sont potentiel  comique de clown triste, déjà éloquent dans Little miss sunshine et même 40 ans toujours puceau, Ryan Gosling qu’il est définitivement l’acteur hype du moment (et des années à venir), alliant beauté brute et jeu  tout en nuance, Emma Stone que son culot et sa fraicheur devraient à elle aussi assurer une bonne place à Hollywood dans les années avenir et enfin Julianne Moore, ben qu’elle est Julianne Moore.

Le film alterne donc situations comiques vraiment réussies, souvent conduites par les rôles secondaires (la prof, la baby-sitter, toutes les deux hilarantes…), et scènes d’émotion dont la justesse est principalement due aux personnages (cf plus haut)

Malheureusement, Crazy stupid love n’échappe pas à quelques longueurs et à une fin pleurnicharde et Grand-Guignol  qui aurait pu / du tout aussi bien être évitée.

Ceci dit, cette limite ne remet pas en cause les qualités réelles et pas si fréquentes du film. Amusant et touchant.