PLACE PUBLIQUE – 13/20

Place publique : AfficheDe Agnès Jaoui
Avec Agnès Jaoui, Jean-Pierre Bacri, Léa Drucker

Chronique : Après un détour par la fable moderne (le joli Au bout du conte en 2013), c’est un retour cynique et désabusé à la comédie humaine qu’opère le duo Bacri-Jaoui.
Certes, ils naviguent clairement dans leur zone de confort, le film chorale grinçant, très écrit et aux ressorts aujourd’hui un peu éculés. Mais les dialogues sont toujours d’une redoutable efficacité pour peu qu’on ne soit pas lassés par les petitesses de leurs personnages, des personnages bien dessinés et ancrés dans une réalité parisianno-bourgeoise dont les auteurs peuvent à loisir pointer du doigt les contradictions, l’égoïsme et la vanité.
On ne parlera donc pas de renouveau ni de renouvellement pour les Bacri-Jaoui, mais on notera que Place Publique se distingue des précédents films du duo par une noirceur inédite et un état des lieux sombre et peu avenant de la société actuelle. Un constat crépusculaire qui engendre plus des rires crispés et malaisés qu’une franche hilarité. Si leurs thèmes de prédilections sont bien présents, le poids du regard des autres, le culte de l’image et du plaire à tout prix, les affres de la réussite, c’est surtout l’effroi de la vieillesse, l’amertume du temps qui passe et les regrets des occasions ratées qui cadence un film peu amène sur le monde actuel.
Jaoui et Bacri font du Jaoui Bacri (mais on aime bien, avouons-le), tout en s’entourant de nouveaux venus dans leurs univers, tous parfaitement à l’aise, en particulier une savoureuse Léa Drucker, comme un poisson dans l’eau.
La mise en scène joue habilement sur les affrontements et évitements entre personnages, démontrant tout le savoir-faire d’Agnes Jaoui pour les films chorale. Mais la réalisatrice aurait pu avoir la main moins lourde sur les musiques et les chansons, omniprésentes et éreintantes.
Place publique? comédie acide et crépusculaire, ne révolutionnera sans doute pas la filmographie du couple Bacri-Jaoui, mais il la marquera peut-être comme la fin d’une ère.

Synopsis : Castro, autrefois star du petit écran, est à présent un animateur sur le déclin. Aujourd’hui, son chauffeur, Manu, le conduit à la pendaison de crémaillère de sa productrice et amie de longue date, Nathalie, qui a emménagé dans une belle maison près de Paris. Hélène, sœur de Nathalie et ex-femme de Castro, est elle aussi invitée. Quand ils étaient jeunes, ils partageaient les mêmes idéaux mais le succès a converti Castro au pragmatisme (ou plutôt au cynisme) tandis qu’Hélène est restée fidèle à ses convictions.
Leur fille, Nina, qui a écrit un livre librement inspiré de la vie de ses parents, se joint à eux.
Alors que Castro assiste, impuissant, à la chute inexorable de son audimat, Hélène tente désespérément d’imposer dans son émission une réfugiée afghane. Pendant ce temps, la fête bat son plein…

READY PLAYER ONE – 13,5/20

Ready Player One : AfficheDe Steven Spielberg
Avec Tye Sheridan, Olivia Cooke, Ben Mendelsohn

Chronique : Avec Ready Player One, Spielberg repense le film d’aventure et nous invite à participer à un trépidant jeu de piste virtuel, au sein duquel se multiplient les hommages à la pop culture dont il est encore et toujours l’un des plus rutilant ambassadeurs. En s’attelant à une mise en abime profondément geek de son propre héritage, le réalisateur parvient miraculeusement à éviter l’auto-citation, (le bouquin fait référence à de maintes reprises à son cinéma, qui n’est convoqué que par clin d’yeux très rares dans le film).
Ready Player One est une madeleine de Proust délicieuse pour qui est né avant les années 2000. Un savoureux sentiment de plaisir retro qui culmine lorsque Spielberg convoque l’un des maîtres du cinéma des années 70/80 pour une séquence d’anthologie profondément jubilatoire.
Pour les autres (ou les moins geeks), RPO reste un divertissement très haut de gamme, avec très peu de temps morts, une virtuosité indéniable dans les scènes d’action, une parfaite maîtrise de l’animation et des allers retours entre l’OASIS et le monde réel. Il ne s’agit pas pour autant d’une œuvre testamentaire de la part de Spielberg. S’il s’amuse comme un gosse avec les références à l’âge d’or d’Hollywood, période qui l’a vu produire ses plus grands chefs d’œuvres, il n’emprunte à sa filmographie qu’un T-Rex et préfère s’attacher à apporter un regard singulier et novateur dans la façon d’aborder le blockbuster d’anticipation. Avec légèreté (c’est souvent drôle) et un arrière propos cher au réalisateur. Thème majeur dans son œuvre, les progrès scientifiques, l’intelligence artificielle, l’affrontement entre le virtuel et le réel composent un important sous-texte qui donne au film une dimension plus profonde qu’un simple divertissement.
Certes, on pourra regretter quelques incohérences, un scénario cousu de fil blanc laissant peu de place à l’émotion et des bons sentiments un peu trop appuyés, mais on ne boude pas le plaisir d’avoir pris part à cette ébouriffante aventure entre vintage et modernité.
Film concept clos dont on ne voit pas passer les plus de deux heures, Ready Player One est aussi porté par deux jeunes acteurs parmi les plus doués de leur génération, Tye Sheridan (Mud) et Olivia Cook (Bates Motel).
Deux mois seulement après le réussi Pentagon Papers, c’est un nouveau tour de force de la part de Spielberg, toujours aussi à l’aise dans son exercice d’équilibriste entre cinéma engagé et divertissement populaire. Qu’il ne s’arrête surtout pas.

Synopsis : 2045. Le monde est au bord du chaos. Les êtres humains se réfugient dans l’OASIS, univers virtuel mis au point par le brillant et excentrique James Halliday. Avant de disparaître, celui-ci a décidé de léguer son immense fortune à quiconque découvrira l’œuf de Pâques numérique qu’il a pris soin de dissimuler dans l’OASIS. L’appât du gain provoque une compétition planétaire. Mais lorsqu’un jeune garçon, Wade Watts, qui n’a pourtant pas le profil d’un héros, décide de participer à la chasse au trésor, il est plongé dans un monde parallèle à la fois mystérieux et inquiétant…