LES MALHEURS DE SOPHIE – 5/20

Les Malheurs de Sophie : AfficheDe Christophe Honoré
Avec Anaïs Demoustier, Golshifteh Farahani, Muriel Robin

Avis : Les Malheurs de Sophie, c’était pour moi cette bande-dessinée qui traînait dans ma chambre d’enfant et que je lisais et relisais, traumatisé par le sort que Sophie réservait à sa poupée (mention spéciale à l’énucléation). C’est donc avec curiosité que je découvrais l’adaptation par Christophe Honoré, cinéaste capable du meilleur (Les Chansons d’amour), comme du pire (Dans paris).
Autant le dire tout de suite, cet opus-là est plutôt à ranger dans la deuxième catégorie. Le choix d’un rendu vintage (format 4/3, éclairage quasi naturel, typographie grossière du générique), rappelle l’esthétique contestable des séries françaises des années 70. Le choix n’est pas très heureux et donne d’emblée un ton suranné au film, pour ne pas dire daté. La réalisation pantouflarde voir négligée n’aide pas à insuffler une quelconque modernité à l’adaptation. Les tentatives d’originalité (animaux en animation, aparté face caméra du domestique), sont tout aussi maladroite. Même la musique d’habitude inspirée d’Alex Beaupain est terriblement empruntée et semble venir d’un autre âge.
Mais le principal problème de ces Malheurs-là est un mal récurrent du cinéma français, la difficulté à trouver un bon casting d’enfants. Et ici, il est bien moins bon que bon, c’est une catastrophe.
Regarder ces chérubins s’efforcer péniblement de réciter un texte dont ils ne comprennent pas un piètre mot devient vite une torture insoutenable, une épreuve aussi pénible qu’assister au spectacle de ton neveu à la kermesse de son école. Impossible dans ces conditions pour le film de trouver le moindre rythme, malgré les efforts louables de Anaïs Demoustier et de Muriel Robin, toutes deux impeccables. Mais cela reste largement insuffisant.

Synopsis : Depuis son château, la petite Sophie ne peut résister à la tentation de l’interdit et ce qu’elle aime par dessus tout, c’est faire des bêtises avec son cousin Paul. Lorsque ses parents décident de rejoindre l’Amérique, Sophie est enchantée. Un an plus tard, elle est de retour en France avec son horrible belle-mère, Madame Fichini. Mais Sophie va pouvoir compter sur l’aide de ses deux amies, les petites filles modèles, et de leur mère, Madame de Fleurville pour se sauver des griffes de cette femme.

DESIERTO – 13.5/20

Desierto : AfficheDe Jonás Cuarón
Avec Gael García Bernal, Jeffrey Dean Morgan, Alondra Hidalgo

Avis : Chasse à l’homme haletante et anxiogène, Desierto est à la fois absolument cinématographique et indéniablement politique. En filmant la traque de migrants mexicains tentant de rejoindre la frontière américaine et pris pour cible par Sam, un redneck, s’improvisant sniper, Jonás Cuarón (fils de) impose un style fort, sec et aride tout en trouvant un écho aux discours un peu nauséabond qui circulent en ce moment (Trumpmania aux USA, crise des migrants en Europe).
Sa caméra cerne habilement la fragilité de leur condition, en rendant tout d’abord compte de la morbidité écrasante du désert lui-même par des plans larges puis du jeu de massacre sadique auquel se prête Sam sur les clandestins.
Sa première apparition pleine d’aplomb et de détermination est terrifiante et il ne se départira jamais de son effroyable violence ni de la haine qui l’habite. Un beau gros salaud de cinéma incarné magistralement par Jeffrey Dean Morgan. Au-delà de la terreur qu’il inspire, on devine tout un tas de traumas, d’aigreurs et de frustrations derrière ses agissements meurtriers xénophobes.
Desierto est un pur fil de genre, un survival moderne teinté de politique, baignant dans une lumière aveuglante et dont la tension va crescendo, admirablement porté par les tambours de l’imposant score de Woodkid (superbe).
Un exercice de style brillamment exécuté.

Synopsis : Désert de Sonora, Sud de la Californie. Au cœur des étendues hostiles, emmené par un père de famille déterminé, un groupe de mexicains progresse vers la liberté. La chaleur, les serpents et l’immensité les épuisent et les accablent… Soudain des balles se mettent à siffler. On cherche à les abattre, un à un

FIVE – 13/20

Five : AfficheDe Igor Gotesman
Avec Pierre Niney, François Civil, Igor Gotesman

Avis : Sympathique ode à l’amitié, drôle et enlevée, Five séduit par sa légèreté, ses punchlines efficaces mais est vite rattrapé par ses maladresses. Le film excelle lorsqu’il se concentre sur le duo Niney/Civil, absolument irrésistible. Il arbore un ton très singulier, emprunte l’écriture débridée de ce qu’ils pouvaient proposer dans le programme court Casting tout en l’adaptant au format cinéma. C’est en ce sens réussi, essentiellement grâce à l’abattage comique du duo qui masque le peu d’ambition de la mise en scène, la naïveté et le doux angélisme du scénario et la faiblesse des autres personnages qui souffrent à la fois d’un manque d’écriture et d’une interprétation aléatoire. Lorsque Five se prend au sérieux et assène des lieux communs et des clichés d’une banalité confondante sur l’amitié du genre « on ne choisit pas sa famille mais ses amis oui », le film atteint ses limites.
Plus « Two Men Show » que véritable chronique générationnelle sur le vivre ensemble, Five se regarde comme un long sketch plutôt réussi. Il vous fera rire, vraiment, mais n’en demandez pas plus. Ceci dit parfois, c’est suffisant.

Synopsis : Cinq amis d’enfance rêvent depuis toujours d’habiter en colocation. Lorsque l’occasion d’emménager ensemble se présente, Julia, Vadim, Nestor et Timothée n’hésitent pas une seule seconde, surtout quand Samuel se propose de payer la moitié du loyer ! A peine installés, Samuel se retrouve sur la paille mais décide de ne rien dire aux autres et d’assumer sa part en se mettant à vendre de l’herbe. Mais n’est pas dealer qui veut et quand tout dégénère, Samuel n’a d’autres choix que de se tourner vers la seule famille qu’il lui reste : ses amis !

LE LIVRE DE LA JUNGLE – 14/20

Le Livre de la jungle : AfficheDe Jon Favreau

Avis: Si ce n’est du scepticisme, les adaptations en live des grands classiques Disney suscitaient jusque-là chez moi une indifférence polie. Quel intérêt de toucher aux chefs-d’œuvre de notre enfance, si ce n’est le risque de les gâcher ? Et puis les bandes annonces du Livre de la Jungle sont arrivées, alléchantes, impressionnantes même, au point de me faire douter… Il fallait donc en avoir le cœur net. Alors j’ai vu.
Un constat, Le Livre de la Jungle version Jon Favreau est une pure splendeur au niveau visuel. Le photoréalisme est étourdissant, les décors sublimes et l’animation des animaux nous laissent tout simplement sur le cul. Le rendu est si bluffant qu’on finit par oublier que seul le garçon est filmé en prises de vue réelles.
L’immersion dans l’univers de Kipling est totale.
Favreau aurait pu se contenter de cette prouesse technique, mais sa réalisation, virevoltante sans sombrer dans l’écueil du brouillon ou du trop-plein, respecte le matériau original et rend justice à l’histoire de Mowgli, une trépidante aventure teintée d’effroi (Shere Khan et King Louis foutent réellement les jetons) et d’une pointe d’émotion. Peu de temps morts, mais pas de surprise non plus pour qui connaît le conte du Petit d’Homme, et c’est peut-être la limite de l’exercice. Petit bémol également sur l’utilisation de deux chansons du dessin animé, superflues et à contre-sens de l’ultra-réalisme recherché.
Mais c’est un détail en comparaison à l’émerveillement que procure ce Livre de la jungle live. Et comme Favreau a en plus déniché un Mowgli mignon tout plein, son pari s’avère une évidente réussite.

Synopsis : Les aventures de Mowgli, un petit homme élevé dans la jungle par une famille de loups. Mais Mowgli n’est plus le bienvenu dans la jungle depuis que le redoutable tigre Shere Khan, qui porte les cicatrices des hommes, promet d’éliminer celui qu’il considère comme une menace. Poussé à abandonner le seul foyer qu’il ait jamais connu, Mowgli se lance dans un voyage captivant, à la découverte de soi, guidé par son mentor la panthère Bagheera et l’ours Baloo. Sur le chemin, Mowgli rencontre des créatures comme Kaa, un pyton à la voix séduisante et au regard hypnotique et le Roi Louie, qui tente de contraindre Mowgli à lui révéler le secret de la fleur rouge et insaisissable : le feu.

QUAND ON A 17 ANS – 15/20

Quand on a 17 ans : AfficheDe André Téchiné
Avec Sandrine Kiberlain, Kacey Mottet Klein, Corentin Fila

Avis : Cinéaste du sentiment et du réel, pour ne pas dire du vrai, André Téchiné retrouve avec Quand on a 17 ans la grâce, l’humanité et la précision sociale qui parcourent ses plus grands films, le dernier en date étant sans doute les Témoins il y a 10 ans. De son temps, résolument moderne, le réalisateur des Roseaux Sauvages aborde à nouveau 20 ans plus tard le thème de l’adolescence et construit un thriller amoureux complexe, effleurant les clichés tout en les évitant avec tact et simplicité.
Au cœur du récit, on observe intrigué l’évolution de cette relation ambiguë et contrariée entre des deux garçons que tout semble opposer, mais dont les gestes et les coups (encore plus que les mots), trahissent une fascination mutuelle dont la nature reste longtemps assez floue. Naviguer en eaux troubles est le propre de cet âge-là, Téchiné le traduit parfaitement bien en restant au plus près de ses jeunes acteurs. Si le thème de l’homosexualité est au cœur du récit, il n’en est pas le principal ressort. Affirmer qui l’on est reste un acte courageux et difficile en 2016 (l’homophobie reprenant de jolies couleurs en 2016…), d’autant plus dans la France rurale que le film prend pour cadre, mais qui n’a plus grand-chose à voir avec ce que sortir du placard représentait vingt ans en arrière. Quand on a 17 ans transmet parfaitement cette évolution, et se construit autant sur la question de la force du lien familial que celle de l’homosexualité. L’un des ados a un père militaire qu’il ne voit que par intermittence et qu’il peut perdre à tout instant, l’autre est un enfant adopté qui ne peut s’empêcher de se demander si ses parents ne l’auraient pas plus aimé s’il avait été leur enfant naturel.
Téchiné saisit cet âge de questionnements dans toute son urgence avec une grande finesse et beaucoup de pudeur. Il se dégage de cette histoire un sentiment pur, une émouvante innocence.
Et c’est finalement un peu lorsqu’on s’y attend le moins qu’on est saisit par l’émotion.
La mise en scène simple et frontale de Téchiné magnifie des acteurs bluffants. La facilité avec laquelle il construit son histoire et tisse les liens entre ses personnages sans que rien ne paraisse forcé est admirable. La fluidité des dialogues, pour lesquels Téchiné a reçu l’aide de Céline Sciamma, participe beaucoup à donner du coffre et du vécu au récit. Et comme souvent, le réalisateur est un remarquable dénicheur de talents. On peut parier que Kacey Mottet Klein et Corentin Fila auront un bel avenir sur nos écrans. Quand à Sandrine Kimberlain, elle met sa douceur et sa justesse de ton au service d’un rôle plus complexe qu’il n’y parait, traduisant parfaitement les certitudes et les doutes d’une femme moderne.

Actuelle, touchante et juste, cette belle chronique adolescente est avant tout une puissante histoire d’amour, celle d’un premier émoi, mais aussi celle qui lie les membres d’un clan qui fait corps.
Simple et beau.

Synopsis : Damien, 17 ans, fils de militaire, vit avec sa mère médecin, pendant que son père est en mission. Au lycée, il est malmené par un garçon, Tom. La violence dont Damien et Tom font preuve l’un envers l’autre va évoluer quand la mère de Damien décide de recueillir Tom sous leur toit.